Leitfaden Sudan : Cuisine locale
Comme bien d'autres domaines, la diversité soudanaise a beaucoup enrichi la cuisine locale. On y trouve à la fois des plats arabes typiques, éventuellement réadaptés, et nombre de recettes et de saveurs africaines. Toutefois, l'arrivée de la cuisine occidentale a bouleversé les habitudes alimentaires de nombreux Soudanais vivant en ville, où pizzas et glaces font désormais un malheur ! Heureusement, le restaurants ne manquent pas et le choix qu'ils offrent est à même de satisfaire toutes les sensibilités.
La cuisine soudanaise est relativement équilibrée. Bien entendu, elle utilise prioritairement les produits locaux et quelques autres provenant des pays voisins.
Les fruits et les légumes sont très importants dans l'alimentation soudanaise. Les fruits sont proposés en dessert ou pour un en-cas. Dans la vallée du Nil, les dattes sont incontournables. On en extrait une liqueur forte, pas très islamique, du nom d'araqi. Ailleurs, les mangues, les goyaves, les gongalès (ou plutôt "tabaldi", qui désigne le baobab, l'arbre qui donne des gongalès), les bananes, les pommes, les pamplemousses, les citrons et les oranges sont les plus courants. Dans l'Est, le moukhbaza, très populaire, est une pâte épaisse à base de banane.
En ce qui concerne les légumes, les oignons, les aubergines, les concombres, les pommes de terre, les carottes, les haricots, les pois chiches, les lentilles et les fèves font couramment partie des repas, même sous la forme la plus simple, comme la soupe, bien sûr. Mais également le foul (fèves) ou le a'das (lentilles). Les piments (falafel) accompagnent, comme au bord de la Méditerranée, certains plats et sandwiches. Le gombo (ou okra) est utilisé pour les sauces ou pour simplement agrémenter une salade. Dans le Sud, le long du Nil, le cassava accompagne les plats de viande. Il s'agit du tubercule, non du manioc mais d'une plante aquatique qui pousse sur le fleuve.
Côté viande, l'agneau et le poulet dominent. On trouve aussi parfois du boeuf, bien plus rarement du dromadaire. Les kebda et shaya sont des petits morceaux de viande grillée (du foie d'agneau pour le premier) que l'on accompagne volontiers d'un plat de légumes et d'une salade. La viande peut aussi être préparée en ragoût. A noter que les oeufs (bayd) sont également très consommés, en "omelette" (en soudanais dans le texte) ou comme ingrédients de certains plats.
Le poisson se déguste plus spécialement sur les rives de la mer Rouge ou le long du Nil, jusque dans le Sud-Soudan. Habituellement, il est grillé mais, dans les établissements près des souks au poisson, on peut choisir sa cuisson. Dans le centre du Soudan, vous pouvez demander un fassikh, un poisson cuit à la sauce tomate avec des oignons et des épices. Dans le Sud, ce sera plutôt le cajayk, une recette à base de poisson séché. Pour accompagner la majorité des plats, on sert souvent une sauce rouge très piquante : le chatta.
Le Soudan produit de nombreuses céréales sur l'ensemble de son territoire. Dans le centre du pays, le 'asida est une épaisse galette de blé, d'avoine ou souvent de sorgho, qui accompagne certains plats comme le moulah, à base de viande, de tomates et d'épices. Le sorgho sert aussi à la préparation de l'abreh, une boisson sucrée à déguster en famille. Le riz est consommé dans la partie sud du pays. Dans le Nord, le gourrasa se compose d'une épaisse crêpe de farine de blé, recouverte de sauce à la viande et aux légumes. Et, un peu partout, le beurre de cacahuète sert également à épaissir les sauces.
Comme en France, un bon repas ne se prendra pas sans pain ! Mais le pain au Soudan (eish) n'est pas comme en France. Il accompagne les plats, mais il est aussi succulent tout seul, tel quel. Le pain soudanais par excellence est la kisra, un pain rond et aplati, de maïs, une céréale également vendue grillée dans les rues de Khartoum. La kisra est très populaire pour accompagner le dama'a (un ragoût de boeuf). A noter, le fata, une appellation générique qui désigne un plat à base de morceaux de pain mélangés avec d'autres plats et souvent gorgés de sauce. En somme, un "hachis parmentier" soudanais pour finir les restes !
Le fromage (joubna) est également apprécié au Soudan et vendu dans de nombreuses épiceries. Il s'agit le plus souvent de fromages de chèvre, assez proches de la féta grecque. On peut aussi les acheter et les déguster séchés.
Les Soudanais, comme nombre de leurs voisins, adorent le sucre, une denrée sur laquelle ils ne lésinent pas pour confectionner des gâteaux (halwiyat) ou des boissons. Les zalabiya sont des beignets que l'on sert dans les cafétérias ou chez les vendeuses de thé. Au restaurant, la "crème caramel" (en soudanais dans le texte) est très appréciée. Il y a également une multitude de baklawa de style arabe (avec du miel, des noix...), dont regorgent les quelques pâtisseries que vous trouverez sur votre chemin. A Port-Soudan, les conish, peu connus, vous réservent une expérience gustative inattendue.
D'abord, en ce qui concerne les heures des repas, il faut savoir que tout comme il y a "l'heure espagnole", on pourrait dire qu'il existe une heure "soudanaise". Les Soudanais petit-déjeunent (foutour) habituellement autour de 11h, jamais avant. Le déjeuner (rada') se prend vers 14 ou 15h. Et le dîner ('acha) vers 21 voire 22h. Bien entendu, tous ces horaires sont bouleversés pendant le mois de Ramadan, où l'on mange seulement juste avant le lever et après le coucher du soleil (pour l'iftar).
Par ailleurs, la différence est, comme partout, très grande entre un repas pris à l'extérieur et un repas pris chez l'habitant. Ce qui veut dire que si un Soudanais vous invite chez lui ou à un mariage, sautez sur l'occasion ! Traditionnellement, les repas en famille sont pris sur le sol recouvert d'une nappe. Pour manger, on se sert de ses doigts (de la main droite !, la gauche étant "impure"...) ou on s'aide d'un morceau de pain. Certains plats autorisent une cuillère, comme ceux avec du riz ou encore les soupes. Un invité, surtout étranger, est un hôte de marque qui mérite toutes les attentions et que l'on n'hésite pas à gaver tant et plus, mais l'intention est bonne. La convivialité ainsi que l'authenticité des plats sont encore plus sensibles chez les habitants que dans les restaurants.
En fait, il existe plusieurs types de restaurants. Les "cafétérias" (en soudanais dans le texte) sont omniprésentes, même dans les quartiers les plus aisés. L'apanage des plus grandes villes, les restaurants se sont diversifiés et leur offre est essentiellement étrangère. Ainsi, vous trouverez à Khartoum les cuisines italienne, libanaise, indienne ou même chinoise. Les "grands" restaurants typiquement soudanais sont inexistants. En outre, les cafés modernes de la capitale concurrencent désormais les traditionnels cafés-chichas.
Les changements dans la vie sociale et les habitudes de travail en ville ont aussi profondément modifié l'alimentation des citadins. L'essor des fast-foods, servant à manger sur le pouce à l'heure de la pause, est un phénomène récent. La multiplication des "burgers" (en soudanais dans le texte), au foul, à la viande ou au poulet, s'est accompagnée de l'importation d'Egypte des "ta'amiya", ces boulettes aux céréales, aux herbes et à la viande. Les pizzas, les salades et les sandwiches en général sont désormais des produits phares de certains restaurants et cafés.
Côté boissons, l'eau est un incontournable pendant le repas, même si les sodas ou les bières islamiques se sont popularisés. Les jus de fruits (mangue, orange, tabaldi, fraise, banane, goyave...) restent heureusement très demandés et les vendeurs sont nombreux dans la rue. Certains restaurants les proposent au début du repas. Les thés, cafés ou carcadets peuvent également accompagner certains repas ou ont simplement une fonction désaltérante quand ils sont pris chez des amis ou dans la rue (voir encadré).
Il est difficile de ne pas les voir. Les vendeuses de thé dans la rue sont présentes dans tout le pays, où elles forment presque une classe sociale à part et une véritable institution ! Au coin de la rue, au souk ou à l'arrêt de bus, les bay'a chay, plus couramment appelées les sitta chay, sont toujours élégamment vétues de voiles et toubes très colorés. Elles sont assises sur un petit siège devant une petite table, elle-même entourée d'autres petits sièges prêts à accueillir les visiteurs de passage. A leur disposition, des gamelles, des verres à thé, des plateaux, des bocaux contenant différents produits et épices, ainsi qu'un réchaud pour faire bouillir l'eau. Pour se désaltérer ou tromper l'attente, les sitta chay servent du thé - sada (ou 'adi, thé classique), akhdar (thé vert) ou laban (thé au lait), avec de la menthe et du sucre -, du café (le jebbana est le café traditionnel) ou encore du carcadet, une infusion de fleurs d'hibiscus très appréciée le long du Nil. Occasionnellement, certaines proposent des zalabiya pour bien commencer la journée !
Ces vendeuses sont très respectées au Soudan et certaines sont réputées pour la qualité de leur thé aux épices. Il y a quelques années, le meurtre de l'une d'elles suscita une vague d'indignation dans tout le pays. Lors de votre passage, ne manquez pas de vous poser quelques minutes sur l'un de leurs petits sièges pour noyer vos tracasseries du moment dans un verre de thé...
Ce plat typiquement soudanais est composé du gurrasa (un pain-crêpe local) et de dama'a (du mouton avec une sauce de légumes).
Ingrédients. Le gurrasa va nécessiter de la farine, de la levure, de l'eau et du sel. La quantité va dépendre de l'épaisseur de la crêpe souhaitée. Le but est d'obtenir une pâte relativement spongieuse. La dama'a, pour 3 personnes, nécessite 400 gr de viande de mouton, 3 tomates, 2 pommes de terre, 2 oignons et 2 carottes, 1 piment vert, ainsi que de l'huile d'olive et, éventuellement, du beurre de cacahuète. Là encore, selon vos goûts et vos envies, vous pouvez choisir des ingrédients complémentaires et des quantités différentes.
Préparation. Coupez en morceaux la viande, ainsi que vos légumes. Mettez successivement les oignons, les tomates, les pommes de terre, le piment et les carottes à chauffer quelques minutes dans une poêle avec de l'huile d'olive et du beurre de cacahuète. Introduisez ensuite les morceaux de viande et faites chauffer pendant 30 min en remuant régulièrement. Parallèlement, mélangez votre levure, votre farine et le sel en délayant progressivement avec de l'eau tiède dans un récipient. N'ajoutez pas trop d'eau pour que la pâte soit relativement épaisse. Applatissez-la ensuite pour lui donner l'aspect d'un large pancake. Passez la pâte un quart d'heure au four, puis disposez-la dans une assiette large et évasée. Versez enfin le contenu de la poêle sur la crêpe. Ce plat se mange habituellement sans couvert, le gurrasa absorbant la sauce, mais il est permis de préférer une banale fourchette ou cuillère.
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