Leitfaden Oran : Arts et culture

Architecture
Une architecture aux multiples influences

De son histoire mouvementée, l'Algérie a conservé plusieurs styles architecturaux bien distincts, qui doivent se comprendre en fonction de leurs origines historiques et géographiques.

Ainsi, Oran et l'Oranie d'aujourd'hui offrent un paysage urbain et un ensemble monumental où se reflètent les influences du Moyen-Orient, de l'Afrique, de la Méditerranée et enfin françaises.
L'Antiquité est marquée par la présence punique comme le montre la nécropole des Andalouses dans la région d'Oran, et par la civilisation romaine dont on peut encore voir les traces à travers le site Portus Magnus de Bethioua ou la nécropole romaine à Bousfer.

A partir du VIIe siècle, l'islam imprègne l'architecture du Maghreb par l'édification de villes serrées à l'intérieur de remparts défensifs où le centre est occupé par le marché et la mosquée dont il reste de magnifiques exemples comme à Tlemcen, souvent proches de l'architecture andalouse par leur dépouillement extérieur et la richesse de leur décoration intérieure.

Au XVIe siècle, les tentatives de conquête espagnole puis l'installation d'une régence ottomane inaugurent une nouvelle ère pour l'urbanisme algérien. A Oran, on peut ainsi admirer encore aujourd'hui de nombreuses fortifications espagnoles dont le célèbre Fort Santa Cruz, mais aussi un important héritage de l'architecture ottomane à travers le Palais du Bey par exemple.

A partir du milieu du XIXe siècle et jusqu'au XXe siècle, la colonisation française va apporter son lot d'édifices typiques. Tous les courants architecturaux en vogue en France vont s'exprimer à Oran avec en plus du néo mauresque dont la coquette gare d'Oran est l'exemple le plus accompli. Les riches viticulteurs vont commanditer de grandes bâtisses art nouveau et art déco. C'est après la Seconde Guerre mondiale que la tendance moderne et fonctionnaliste s'impose.

Edifices religieux

Le symbole de l'urbanisme traditionnel est la mosquée (djamaa, " rassemblement "), principal édifice de la vie collective. Qu'elle soit mosquée de quartier ou grande mosquée où a lieu la prière solennelle du vendredi, elle se compose de différentes salles et cours, chacune attribuée à une étape de l'exercice du culte. Le minaret est la tour du haut de laquelle le muezzin appelle les fidèles musulmans à la prière, remplacé maintenant par une bande enregistrée. On distingue les minarets octogonaux ottomans (rite hanafite) des minarets de section carrée d'influence maghrébine (rite malékite).

On trouve un grand nombre de mosquées à Oran, que ce soit des mosquées héritées de l'époque ottomane comme la mosquée du Pacha mais aussi des mosquées plus modernes comme la mosquée Ibn Badis inaugurée en 2015.

Les marabouts sont des édifices généralement cubiques, surmontés d'une coupole blanche. Ce sont les dernières demeures des ascètes, les marabouts. Ces religieux sont considérés comme des saints et des faiseurs de miracles. De nos jours, ils continuent à faire l'objet d'une grande vénération populaire, des malades ou des personnes en quête de spiritualité, à l'image de Sidi El Houari et Sidi El Hasni qui font l'objet, chaque année, d'importantes célébrations à Oran en juillet (procession jusqu'à leur mausolée, veillées...).

Oran est aussi riche d'églises et cathédrales de différentes époques, dont certaines ont été transformées en bibliothèque ou centre culturel. Mais c'est de loin la basilique et la chapelle de Santa Cruz, véritables cartes postales d'Oran, qui incarnent le mieux cet héritage chrétien d'Oran.

Enfin, la ville d'Oran a préservé l'édifice de l'ancienne synagogue, aujourd'hui transformé en mosquée.

Les beaux balcons du centre-ville d'Oran

Si vous levez la tête en vous promenant dans le centre-ville, vous ne vous lasserez pas d'admirer les balcons en raison de leurs magnifiques motifs en fer forgé dont aucun ne ressemble à l'autre. Ils ont été produits par les ateliers de Versailles et les fonderies Ducros.

Artisanat
<p>Orfèvrerie kabyle.</p>

Orfèvrerie kabyle.

Longtemps délaissé et peu mis en valeur, l'artisanat algérien connaît souvent des difficultés économiques. Mais si certaines pratiques tendent à disparaître - c'est le cas de la dinanderie - d'autres savoir-faire, comme le tissage et l'orfèvrerie, sont perpétués.

Oran et Tlemcen comptent quelques belles boutiques d'artisanat, sinon c'est dans les marchés comme celui de M'dina J'dida à Oran qu'on pourra se procurer des pièces intéressantes.

Les bijoux font traditionnellement partie du patrimoine algérien. Toutes les occasions sont bonnes pour arborer bracelets, colliers, boucles d'oreilles et ceintures (foum) en métaux précieux. Quand les temps étaient moins durs, les bijoux faisaient partie de la dot de la future mariée qui les accumulait au fil de son mariage " au cas où... ". Les femmes répudiées quittaient le domicile conjugal avec pour seul viatique leurs bijoux. Tlemcen est particulièrement réputée pour la production de bijoux en or.

Broderie. La broderie, tarz, est un art citadin très pratiqué en Algérie et vous trouverez de nombreuses pièces brodées dans les marchés et boutiques des villes de l'Oranie.

Cuir. Le travail du cuir produit des chaussures dont des babouches, des bottes, des sacs, des ceintures, des récipients, des housses de coussin, des boîtes, etc. A Tlemcen, l'artisanat est réputé pour ses traditions andalouses.

Dinanderie. Héritage de l'Empire ottoman, la dinanderie, ou l'art de travailler le cuivre pour fabriquer des plateaux, des théières et autres récipients, remonte au Moyen Age mais elle a failli mourir étouffée par la production industrielle.

C'est à Tlemcen que la tradition perdure vraiment. Arrivée avec les Almohades et d'inspiration andalouse, la dinanderie s'exerce à la fabrication de lanternes décorées de vitraux colorés, de marteaux de portes, de lustres et de plateaux.

Tapis. A l'origine, transmis de génération en génération, l'art du tissage est l'une des meilleures illustrations de la créativité artisanale et artistique de chaque région comme des métissages culturels (berbère, arabo-musulman, africain et oriental) qui ont fait le pays. A l'ouest, les tapis de Kalaâ de Béni Rached (Oranie), aux tons doux et variés, sont réputés pour leur beauté.

Vannerie. Art très ancien dont on a trouvé des traces en Mésopotamie et en Egypte, la vannerie est encore répandue en Algérie. Vous en trouverez facilement à Oran et dans toute l'Oranie dans les boutiques ou les marchés (corbeilles, paniers, couffins...).

Verre. L'influence turque est perceptible dans le travail du verre. D'origine turque, arabe ou andalouse, le travail du verre se décline sous plusieurs formes, du verre soufflé (lampes, verres à thé, fioles à parfum ou bonbonnières) au verre martelé (fenêtres et vitraux). L'Oranie riche des influences turque, arabe et andalouse est riche de cet artisanat du verre et vous en trouverez facilement sur place.

Que rapporter de son voyage ?

Des tapis faits main, des nappes brodées, des bijoux, des plateaux ou des théières en cuivre, des sacs en cuir, des babouches... Vous l'avez compris, l'artisanat de l'Oranie a mille et une merveilles à vous offrir ! Ne les manquez pas ! Sans oublier la petite boîte de gâteaux orientaux pour poursuivre le voyage sur un mode culinaire une fois de retour en France.

Expressions modernes

Les débuts du théâtre en Algérie. Le théâtre algérien est né timidement, et souvent en amateur, au début du XXe siècle, plus précisément dans les années 1920. Utilisant les codes du théâtre européen, il exprime et retranscrit en premier lieu le patrimoine oral algérien. Les pièces sont généralement écrites en arabe classique ou en arabe dialectal, comme le faisait Kateb Yacine qui voulait que ses pièces soient comprises par la majorité.

Mais la véritable naissance du théâtre a lieu en avril 1926, lorsque Mahieddine Bachetarzi (1897-1986), Allalou (1902-1992) et Rachid Ksentini (1887-1944) présentent à Alger Djeha une pièce " algérienne ".

A partir du milieu des années 1940, le théâtre met en scène les espoirs et les revendications qui osent s'exprimer. En 1947, Mustapha Kateb (1920-1989) crée sa propre troupe, Al-Masrah Al-Djazaïri.

Il fera partie de la troupe artistique du FLN et animera l'Institut national des arts dramatiques (Bordj El-Kiffan, banlieue d'Alger) tout en militant pour la décentralisation des théâtres d'Etat.

Le théâtre engagé et le rôle fondamental de l'Oranais Abdelkader Alloula. Après l'Indépendance, le théâtre, nationalisé en 1965, conserve sa valeur révolutionnaire mais entre théâtre national, théâtre militant, théâtre socialiste et théâtre populaire, les tendances s'affrontent. Abderrahmane Kaki (1934-1995) passe du français (La Valise, L'Oiseau vert) à l'arabe dialectal compris par le plus grand nombre (132 ans, Al-Guerrab oua Salihine).

Kateb Yacine (1929-1989) apporte au théâtre algérien contemporain une dimension plus universelle, et dirigera un temps le théâtre de Sidi Bel Abbès.

Le troisième auteur marquant de cette période post-révolutionnaire est Abdelkader Alloula, comédien et metteur en scène né en 1939 et assassiné en mars 1994 à Oran pendant la décennie noire alors qu'il quittait son domicile en centre-ville (le théâtre régional d'Oran porte son nom en guise d'hommage). A travers ses pièces qu'il écrit à partir de 1969 (Al-Khobza, " Le pain ", Al-Lithem, " Le voile " ou Al-Adjwad, " Les généreux "), il s'emploie à dénoncer la bureaucratie ou les fonctionnaires et à défendre le théâtre populaire et politique.

Le théâtre algérien aujourd'hui et son importance dans l'Oranie. L'Algérie dispose aujourd'hui de sept théâtres publics répartis sur le territoire dont trois dans l'Oranie : un à Oran, un à Sidi Bel Abbès et un à Mostaganem où a lieu chaque année le festival du théâtre amateur. Parallèlement au théâtre national, le théâtre amateur est beaucoup plus dynamique notamment parce qu'il a également servi à véhiculer les idéologies dominantes auprès des jeunes qui se sont appropriés ce moyen d'expression ce qui a donné " un coup d'accélérateur " au quatrième art en Algérie.

Cinéma
Le cinéma algérien, des origines à nos jours

A partir des années 1920 et jusqu'en 1962, une centaine de films de fiction sont tournés en Algérie qui offre aux cinéastes ses paysages et son architecture exotiques et un climat ensoleillé. Pendant la guerre d'Algérie, cinémas européen et algérien produisent des films de propagande, les uns exaltant la mission de la France, les autres dénonçant la colonisation donnant un ton à ce mode d'expression qui débute.

Dans les années 1960, le colonialisme, le mouvement de libération nationale et le patriotisme restent le sujet principal de films austères (Le Vent des Aurès de Mohamed Lakhdar-Hamina, 1967).

Dans les années 1970, les préoccupations sociales et la construction du socialisme prennent la place du souvenir. Les thèmes souvent traités sont le déracinement et l'émigration (Alice au pays des mirages d'Ahmed Rached, 1978) ou le statut et l'émancipation des femmes (Elles d'Ahmed Lallem, 1966, Leïla et les autres de Sid Ali Mazif, 1977).

En 1975, le film de Mohamed Lakhdar-Hamina, Chroniques des années de braises, reçoit la Palme d'or à Cannes et marque l'existence du cinéma algérien sur la scène internationale. Les films de cette époque, dits de " cinéma nouveau ", portent sur de nouveaux thèmes et défendent une nouvelle esthétique.

A partir du début des années 1980, les noms de réalisateurs vivant hors d'Algérie apparaissent. Parmi ces films qui traitent de l'émigration ou de la vie en France, on se souvient du Thé au harem d'Archimède de Mehdi Charef (1983).

Les films de la fin des années 1990 reflètent, souvent de façon ironique et désabusée, le désarroi de la société algérienne. Bab El-Oued City ou Salut Cousin ! de Merzak Allouache (1996), ou L'Arche du désert de Mohamed Chouikh (1997) traitent de la dégradation des relations et de la perte des repères.

Aujourd'hui, on espère la renaissance du cinéma algérien qui a failli disparaître, mais pour le moment c'est encore par le travail de réalisateurs ou de producteurs vivant hors d'Algérie qu'il peut exister. En 2000, Nadir Moknèche tourne Le Harem de Madame Osmane et montre la société contemporaine. Trois ans plus tard, il sort Viva Laldjérie !, dans lequel il filme à nouveau des femmes.

En 2001, après sept années d'absence, Merzak Allouache retourne en Algérie pour y tourner L'Autre monde. Deux ans plus tard, il réalise un film sans grand rapport avec l'Algérie mais connu de tous : Chouchou avec son ami Gad Elmaleh rencontré sur le tournage de Salut cousin ! En mars 2005, il sort Bab El Web, avec Faudel, Samy Naceri et Julie Gayet, qui relate la rencontre entre jeunes de Bab El-Oued et une Française connue sur un tchat.

Parmi les autres sorties récentes, Morituri (2007) de Okacha Touita est une adaptation du premier volet de la trilogie de Yasmina Khadra dans laquelle le commissaire Llob traque les terroristes des années 1990. Né quelque part de Mohamed Hamidi (2013) est une comédie touchante ou Djamel Debbouze joue le rôle de Farid, un Français qui se rend en Algérie pour la première fois ; Certifiée halal de Mahmoud Zemmour (2014) avec Hafsia Herzi et Smaïn dans les rôles principaux est une comédie qui dénonce les mariages forcés alors que deux mariées sont malencontreusement échangées ; La Vache de Mohamed Hamidi (2016) avec Lambert Wilson et Jamel Debbouze (petit rôle), raconte l'histoire de Fatah qui est invité à présenter sa vache au salon de l'agriculture en France alors qu'il n'a jamais quitté l'Algérie ; Good Luck Algeria de Farid Bentoumi (2016) avec Sami Bouajila, Franck Gastambide et Chiara Mastroiani, raconte le pari fou de Sam qui décide de se qualifier à la compétition de ski des Jeux Olympiques pour le pays de ses origines, l'Algérie, ce défi l'oblige à renouer avec ses racines.

Cependant, tous ces films sont finalement surtout regardés dans les salles de cinéma françaises...

En Algérie, l'entreprise est plus ardue parce qu'il ne suffit pas de faire des films, encore faut-il qu'ils soient vus par un public qui n'a plus l'habitude d'aller au cinéma et pour qui la location de DVD de films disponibles le jour même de leur sortie en France (et souvent avant grâce au piratage de DVD doublés en québécois) est synonyme de cinéma...

Quelques films et documentaires tournés à Oran

Long-métrages

L'inspecteur marque le but, 1975, 1h57, réalisé par Kaddour Brahim Zakaria.

Le Premier Homme, 2011, drame, 1h41, réalisé par l'italien Gianni Amelio.

Zabana, 2012, 1h50, réalisé par Said Ould Khelifa.

Les Portes du soleil (L'Algérie pour toujours), 2015, action, 1h30, réalisé par Jean-Marc Minéo.

L'Oranais, 2014, drame/histoire, 2h08, réalisé par Lyes Salem

Court-métrages

Collision, 2017, documentaire, 9 min, réalisé par Benmokhtar Fethi.

Documentaires

L'Algérie vue du ciel, 2015, documentaire, réalisé par Yann Arthus-Bertrand &amp; Yazid Tizi.

Emission Thalassa

Algérie, la mer retrouvée, 2015, documentaire, 110 min, produit par l'agence Capa, réalisé par Alexis Marant et Guillaume Pitron.

Bientôt un film sur l'émir Abdelkader ?

Un film sur l'émir Abdelkader est sur le point d'être réalisé. Hocine Mustapha, un acteur algérien originaire d'Oran, est bien parti pour incarner cette figure historique mythique car il lui ressemble comme deux gouttes d'eau... Pour mieux rentrer dans la peau du personnage, il a laissé pousser sa barbe et il a fait des photos dans la tenue de l'époque de l'Emir afin de convaincre la production et le ministère de la Culture de lui donner le rôle.

Petit plus : il a des liens parentaux lointains avec l'émir puisque c'est un descendant de la famille de l'émir Abdelkader de la 14e lignée ! En attendant ce qui pourrait bien être le rôle de sa vie, Hocine Mustapha poursuit sa carrière au cinéma et dans les téléfilms.

Au moment de la rédaction de ce guide, la production du film n'avait cependant pas encore réussi à avoir les budgets nécessaires à la réalisation du long-métrage.

Affaire à suivre !

Littérature
Petite histoire de la littérature algérienne

Ce n'est qu'au XXe siècle que nait une littérature algérienne à proprement parler.

De la pénétration française au XIXe siècle, on connaît principalement les récits et fictions écrits par des écrivains français en voyage en Algérie.

Dans les années 1920, le courant algérianiste réunit des artistes qui revendiquent leur algérianité, à la différence des écrivains qui ne font que passer en Algérie et ne peuvent rien y entendre. Robert Randau (1873-1946), qui a écrit les Colons et Cassard le Berbère, apparaît comme le chef de file du mouvement. L'école d'Alger, quant à elle plus universelle, regroupe à partir du milieu des années 1930 Albert Camus ou Emmanuel Roblès, deux écrivains qui ont par ailleurs vécu à Oran et en parlent tous les deux dans leurs ouvrages.

Il faut cependant attendre les années 1945-1950 et l'affirmation de l'identité et de la culture algériennes, jusqu'alors niées, pour qu'apparaisse une littérature algérienne où la recherche esthétique devient sensible. Se distinguent entre autres Mohamed Dib (La Grande Maison, 1952), ou, plus revendicatifs, Kateb Yacine (Nedjma, 1956), un temps directeur du théâtre de Sidi Bel Abbès.

Mais les écrivains qui écrivent en français se sentent coupables d'utiliser la langue du colonisateur et se trouvent donc devant un dilemme : continuer ou renoncer à écrire en français. Dans un premier temps, les écrivains algériens d'expression française (Mouloud Feraoun, Mohamed Dib, Kateb Yacine, Malek Haddad...) restés en Algérie après 1962, ont continué à écrire en français. D'autres, très rares, écrivent en arabe. Kateb Yacine compose par exemple ses pièces de théâtre en arabe dialectal pour les rendre accessibles au plus grand nombre.

Le genre romanesque en arabe apparaît dans les années 1950 avec Reda Houhou et se développe dans les années 1970 avec Abdelhamid Benhedouga (Vent du Sud, 1971) et Tahar Ouettar (L'As, 1974), traduit dans plusieurs langues. L'Algérie devient même le premier pays d'Afrique en matière de production littéraire.

Au fil des années post-Indépendance, l'arabisation du pays rend la situation des écrivains moins confortable jusqu'à devenir intolérable au cours des années 1990 qui ont vu partir nombre d'écrivains francophones menacés par l'intégrisme islamique. Poussés à fuir le pays, beaucoup d'écrivains francophones ont alors encouragé une délocalisation et un éparpillement de la littérature algérienne.

La lutte pour la libération et la construction du socialisme restent longtemps la thématique principale du roman algérien mais peu à peu les littératures d'expression francophone ou arabe s'interrogent sur le sens de la lutte de moins en moins évidente à la lumière de la réalité algérienne.

Malgré des années éprouvantes, la littérature algérienne, les romans, les récits, le théâtre ou la poésie semblent avoir trouvé une identité qui se dégage peu à peu des écrits d' " urgence ", même si le poids de la guerre, des crises, de l'exil, du déchirement entre plusieurs cultures ou du rejet est encore lourd.

Deux écrivains oranais contemporains majeurs

Parmi les écrivains oranais les plus connus, deux d'entre eux s'imposent.

Yasmina Khadra. De son vrai nom, Mouhamed Moulessehoul, Yasmina Khadra vit à Oran. Il est l'auteur de nombreux ouvrages à succès comme Les Sirènes de Bagdad (2006), Ce que le jour doit à la nuit (2008), La dernière nuit du Raïs (2015) pour n'en citer que quelques-uns. Beaucoup de ses livres ont été traduits dans plusieurs langues et publiés dans différents pays. Il a déjà reçu de nombreux prix littéraires dont le Grand Prix de Littérature Henri Gal, prix de l'Institut de France, en 2011.

Kamel Daoud. Originaire de Mostaganem, Kamel Daoud vit à Oran. Il est notamment l'auteur d'un roman traduit dans le monde entier Meursault, contre-enquête (Actes Sud, 2014. Goncourt du premier roman).

En 2017, il publie Zabor ou les Psaumes (Actes Sud), son deuxième roman, une parabole autour du besoin impérieux d'écrire pour repousser la mort.

Oran vu par l'écrivain Yasmina Khadra...

" Née d'un besoin de séduire, Oran, c'était d'abord le chiqué. On l'appelait la ville américaine, et toutes les fantaisies du monde seyaient à ses états d'âme.

Debout sur sa falaise, elle regardait la mer, faussement languissante, rappelant une belle captive guettant du haut de sa tour son prince charmant.

Pourtant, Oran ne croyait pas trop au large, ni au prince charmant. Elle regardait la mer juste pour la tenir à distance. Le bonheur était en elle, et tout lui réussissait. "

Extrait de Ce que le Jour doit à la Nuit de Yasmina Khadra (éditions Pocket).

A lire pendant votre séjour à Oran

Voici quelques ouvrages écrits par des auteurs oranais ou des livres qui parlent d'Oran et de l'Oranie, de près ou de loin.

Kamel DAOUD, Zabor, ou Les psaumes, Ed Barzakh, Actes Sud, 2017.

Yasmina KHADRA, Ce que le jour doit à la nuit, Ed.Pocket, 2009.

Assia Djebbar, Oran, une langue morte, Ed Babel, 2001.

Dalila AZZI, Les Galants de nuit, Ed. Anep, 2017.

Amina MEKAHLI, Le secret de la girelle, Ed Anep 2017.

Fatima BEKHAÏ, Raconte-moi Oran, Ed. association Petit Lecteur, 2003.

Yahia BELASKRI, Abdelkader, le combat et la tolérance, Ed. Magellan-Cie, 2016.

Abdelkader DJEMAI, La Vie (presque) vraie de l'abbé Lambert, Ed Seuil, 2016.

Bouziane BENACHOUR, Kamar, le temps abrégé, Ed. Anep, 2016.

Amin ZAOUI, Un incendie au paradis, Ed. Tafat 2016.

Wassiny LAAREJ, la 1007 ème nuit, Ed. Enag, 2015.

« La Peste » d'Albert Camus, un roman qui se déroule à Oran

La Peste est publié en 1947 et vaut à Albert Camus son premier succès littéraire. Ce roman s'est vendu, depuis, à plus de 5 millions d'exemplaires, toutes éditions françaises confondues.

L'intrigue est bâtie comme une tragédie en cinq actes et elle se déroule à Oran.

Le roman raconte la vie quotidienne des habitants d'Oran pendant une épidémie de peste qui frappe la ville et la coupe progressivement du monde extérieur, l'enfermement et la peur modifiant par ailleurs les comportements des habitants.

Cette épidémie de peste dépeinte par Albert Camus dans son ouvrage serait une image de la " peste brune ", à savoir le nazisme, qui s'était répandue en Europe une dizaine d'années avant la parution de l'ouvrage. Les différentes actions menées par certains personnages du roman pour éradiquer cette peste ont rapidement été assimilés à des actes de résistance contre le nazisme. Quand Roland Barthes, critique littéraire, émet des doutes quant à cette analogie, voici ce qu'Albert Camus lui répond peu après dans une lettre ouverte : " La Peste, dont j'ai voulu qu'elle se lise sur plusieurs portées, a cependant comme contenu évident la lutte de la résistance européenne contre le nazisme. La preuve en est que cet ennemi qui n'est pas nommé, tout le monde l'a reconnu, et dans tous les pays d'Europe. Ajoutons qu'un long passage de La Peste a été publié sous l'Occupation dans un recueil de Combat et que cette circonstance à elle seule justifierait la transposition que j'ai opérée. La Peste, dans un sens, est plus qu'une chronique de la résistance. Mais assurément, elle n'est pas moins. "

Entretien avec l'écrivain Kamel Daoud

Kamel Daoud, un des écrivains algériens contemporains les plus connus, vit à Oran.

Lors d'un entretien réalisé dans sa ville, il nous a donné ses bonnes adresses et nous a expliqué le charme si particulier qu'avait pour lui cette ville.

Pourquoi aimez-vous Oran ?

" Parce que cette ville a les avantages d'une capitale sans en avoir les inconvénients.

Le fait qu'elle soit la seconde ville du pays est un vrai plus, c'est aussi bien qu'une seconde chance.

On dit souvent qu'Alger c'est la porte de l'Algérie mais Oran c'est sa fenêtre.

Parce qu'elle donne sur la mer, elle donne sur les grands espaces, sur le Maroc... Et contrairement à Alger, c'est une vraie ville portuaire.

Je suis né à Mostaganem, que j'aime beaucoup et où vit encore ma mère, mais Oran c'est ma ville d'adoption et j'adore profondément cette ville. "

Quelle est votre route préférée dans la région oranaise ?

" J'aime bien les vieux villages coloniaux. Il existe une belle route à emprunter, celle qui va de Oran vers Aïn Temouchent mais il faut prendre la vieille route, la route côtière, car il y a des vieilles fermes, des vieilles plantations de l'époque coloniale et tout ce paysage est vraiment magnifique. "

Où aimez-vous sortir ?

" J'aime beaucoup le bar le Titanic, j'y vais souvent. Mais j'ai vraiment une affection particulière pour le Titanic car j'y ai tous mes souvenirs de jeunesse, on allait souvent y boire des verres avec des copains.

J'adore le Mélomane, c'est un style de bar vraiment à part avec son karaoké et sa déco assez kitsch mais c'est vraiment un endroit convivial, le patron Bouzid c'est un personnage très énergique. J'aime bien le Marquis, c'est un bon restaurant, on y mange bien, j'y vais souvent. Le bar le Dragon il est très sympa, il avait fermé mais il a rouvert heureusement. "

De quel sujet traite votre dernier roman ?

" Mon roman Zabor ou les Psaumes parle d'une personne qui est obsédée par l'idée d'écrire. Mon personnage ne veut pas s'arrêter d'écrire de peur que quelqu'un meure par sa faute quelque part, s'il n'écrit pas.

C'est une sorte de malédiction d'un écrivain fou. Il écrit sur tout, il fait par exemple des descriptions de gens qu'il rencontre ou transforme des textes mais, quoiqu'il écrive, il est persuadé que ses textes sauveront des vies.

Cet acte d'écriture est à la fois un bonheur pour lui et en même temps une souffrance car il n'a pas le temps de faire autre chose. L'histoire se déroule dans un petit village qui n'est pas localisé précisément mais qui se trouve au Maghreb. "

Votre prochain roman aura-t-il un lien avec Oran ?

" J'ai en effet un projet de roman sur Oran dont je ne peux pas pour l'instant vous révéler l'intrigue dans la mesure où je ne l'ai pas encore complètement définie.

Par ailleurs, j'envisage aussi de collaborer à un beau livre de photos sur Oran où j'écrirai les légendes. "

Cervantes en mission secrète à Oran...

Le célèbre écrivain espagnol Miguel de Cervantes a séjourné à Oran en juin 1581 à l'occasion d'une mission secrète pour le compte du Roi d'Espagne Philippe II. Il était chargé de transmettre un message au pouvoir espagnol à Oran, il s'agissait d'un message stratégique qui incitait Oran à s'armer au maximum, notamment dans l'arrière-pays, en vue de la préparation d'une attaque contre Alger.

Cette visite secrète a inspiré à l'écrivain une comédie El Gallardo Español (le Brave Espagnol). Ecrite en 1595, cette comédie n'est pas une oeuvre majeure de Cervantes mais, basée sur des faits réels, elle raconte le siège d'Oran en 1563 par Hassan Pacha et Cervantes y décrit de façon très réaliste et détaillée le Oran de cette époque.

Musique

La musique oranaise dans sa grande diversité est née de diverses influences, qu'elles soient ethniques ou religieuses. Les deux principaux genres musicaux dont la région a été le berceau sont la musique arabo-andalouse et le raï. Elle tient une grande place dans la vie quotidienne en rythmant les événements, heureux ou malheureux, depuis les temps les plus reculés.

Musique arabo-andalouse

" Poètes et musiciens furent chassés des cours royales. Ils furent traités avec le plus grand des mépris. Pourtant cet art survécut grâce au peuple andalou. Il exprimait l'art de vivre des habitants de Grenade, de Tolède, Cordoue, Séville, Murcia et Alméria. C'est dans les tavernes de ces villes que cet art prit son essor. Ce sont les "gueux" qui lui permirent de s'épanouir. [... ] C'est beaucoup plus tard que les princes et les nobles des cours andalouses permirent à leurs chastes oreilles de s'encanailler. " Latifa Ben Mansour, La Prière de la peur, Editions de la Différence, 1997.

La musique classique algérienne dite " andalouse " est l'une des expressions de l'héritage des traditions musicales orientales, autant grecques que persanes et arabes, réunies à Bagdad et à la cour de la dynastie abbasside (VIIIe-XIIIe siècles). La légende raconte qu'en 822, un musicien venu de Bagdad avec son luth (oud) d'argent auquel un ange aurait ajouté une corde, celle de l'âme, fut reçu à la cour du fondateur du califat de Córdoba. Abou El-Hassan Ali Ibn Ennafi, dit " Zyriab ", tel était son nom, avait retenu au cours de sa vie plus de 10 000 mélodies et poèmes célébrant l'amour courtois et l'élan vers Dieu qui lui permettaient de créer une nouba pour chaque heure (noubate au pluriel) et 84 modes au travers desquels pouvaient être exprimés autant d'états d'âme qui leur ont donné leur nom.

A partir du XIIIe siècle, les musulmans chassés d'Andalousie échouent sur les côtes d'Afrique du Nord, à Oran en particulier, et transmettent leur art à leurs hôtes qui s'enivrent des noubate jouées à l'unisson sur des rythmes et des modes rigoureusement établis, ponctuées de pièces lyriques, souvent des poèmes en arabe classique (le mouwashah et son dérivé populaire le zajal). Les orchestres, qui respectent la règle de l'unisson, sont composés de flûtes de roseau (nay), de tambours et de tambourins (tbiblat, tar et derbouka), de luths (oud), de cithares, de rebebs (petits violons à deux cordes dont est issu le rebec de l'Europe médiévale) et de violons qu'on joue verticalement posés sur une cuisse.

Le hawzi est la forme populaire de la musique arabo-andalouse de l'école ghernati dite de Tlemcen, qui revendique l'héritage musical de Grenade, et chante les sentiments souvent contradictoires qui animent la vie et l'amour pour la cité " aux 1 000 sources ". Le çanaa, qui est rattaché à Córdoba (Cordoue), est joué à Alger où a également pris forme le chaâbi, tandis que le maalouf de Constantine serait originaire de Séville.

Parmi les interprètes, on retient les noms de Cheikh M'Nemmeche, Benteffahi, Mouzino, Mohamed, Abderrezzak Fekhardji (violoniste et chef d'orchestre mort en 1984), Mahieddine Bachtarzi, Dahmane Benachour, Abdelkrim Dali, Mohamed Khaznadji, Ahmed Serri d'Alger, Cheikh El-Arbi Bensari et Cheikh Redouane Bensari (Tlemcen). Parmi les femmes, on note les noms de Yamna Bent El-Hadj El-Mahdi, Cheikha Tetma, Meriem Fekkaï ou Fadhila Dziria.

Dahmane Ben Achour : la nouba, musique classique arabo-andalouse, école d'Alger. Plusieurs CD enregistrés dans les années 1990 distribués par le Club du disque arabe.

Mohamed Khaznadji : anthologie de la musique arabo-andalouse. Plusieurs CD distribués par Ocora/Radio-France.

Les disques produits par les ensembles Es-Soundoussia, Ahbab Cheikh El-Arbi Bensari (Tlemcen) ou El Djazaïriya-El Mossiliya chez Ocora ou Institut du monde arabe.

Nour Ed-Dine Saoudi : musique classique arabo-andalouse en Algérie dans une série de CD édités par Artistes arabes associés.

Hadj Mohamed Tahar Fergani : Anthologie de la musique arabo-andalouse, volumes I et II, Ocora/Radio-France, 1991 et 1992.

Raï

Le mot raï signifie " conseil " dispensé par les vieux du village mais qualifie aussi la vulgarité. Il désigne aujourd'hui une forme musicale connue dans le monde entier et chantée par toute une jeunesse algérienne qui a soif de vivre, avec pour thèmes principaux l'amour, la fête, la vie noctambule et la solitude, exprimés dans un langage souvent cru. Mais le raï est bien antérieur à l'apparition du sourire éclatant de Khaled. On le fait remonter à la rencontre entre le bédoui traditionnel, la forme populaire du nomade gharbi du sud-ouest algérien, qui a investi les cafés d'Oran dans les années 1920-1930 et les chansons chantées par les femmes (cheikhats) pour les femmes pendant les fêtes familiales. Les stars du moment se nommaient Hachemi Bensmir, Abdelkader El-Khaldi (mort en 1964) ou Cheikh Hamada (mort en 1986). Les textes poétiques des maîtres (cheikhs) étaient alors accompagnés par un petit orchestre composé d'une flûte en roseau (gasba), d'un tambourin (bendir) et par des percussions (guellal ou derbouka).

Une décennie plus tard, le bédoui prend de nouvelles teintes inspirées des accords de la musique égyptienne, dont la star de l'époque, Oum Kalthoum, inonde les ondes du Maghreb, et les textes prennent un ton légèrement plus revendicatif. Deux chanteurs se distinguent. Le premier, Blaoui El-Houari, musicien autodidacte né et mort à Oran (en juillet 2017), est considéré comme le précurseur de la chanson réellement oranaise. Puisant dans le répertoire du bédouin oranais, il agrémente les textes traditionnels de rythmes espagnols et latinos et d'instruments européens dans une volonté de modernisation. Sa renommée dépasse rapidement les rues d'Oran et toute l'Algérie connaît bientôt ses chansons simples, spontanées et fraîches. Il a eu une influence retentissante dans le monde du raï parmi lesquels le chanteur à textes, Houari Benchenet qui interprètera notamment la célèbre chanson " Arssam Wahran " une chanson de 14 minutes sur Oran dont Blaoui el Houari a composé la musique.

Dans les années 1950, les vedettes du raï s'appellent Lili Boniche, Reinette l'Oranaise (morte en 1998), Edmond Atlan ou Djelloul Bendaoud.

Ahmed Wahby, " la voix de velours d'Oran ", quant à lui, est né au début des années 1920 à Marseille. De retour en Algérie, il se produit à Oran et à Alger mais c'est à Paris qu'il enregistre la première chanson dite " oranaise " : Alache Tloumouni. Auprès de Mohamed Djamoussi, compositeur, de Mohamed Abdelwahab et de Farid El-Atrach, le " rossignol triste ", il perfectionne sa pratique de l'oud (luth) et étudie la musique arabe classique. Son premier grand succès, Wahran Wahran, repris plus tard par Khaled, célèbre sa ville et devient emblématique du raï. Il s'engage dans la lutte pour l'indépendance en 1957 et, dès 1965, il crée l'Institut de la musique arabe à Oran avant de s'installer au Maroc. En 1970, il célèbre son retour en Algérie en composant l'un de ses succès les plus retentissants, Fet elli fet.

Pendant ce temps, le raï des débuts rencontrait le jazz et la pop dans les années 1960 et préparait la voie à l'explosion du raï dans les années 1980. Le trompettiste Messaoud Bellemou est le premier qui ose remplacer les instruments traditionnels par trompettes, saxophones et guitares électriques. En 1974, il rencontre Safi Boutella, un jazzman. Une dizaine d'années plus tard, de jeunes musiciens introduisent synthétiseurs et boîtes à rythmes de leur époque.

C'est en 1986 que la France découvre le raï avec Khaled, encore Cheb (le préfixe signifiant " jeune " distinguait les nouveaux venus des générations précédentes), qui rencontre le succès en 1992 avec Didi. L'autre star du raï, Cheb Mami, originaire de Saïda, a ouvert encore plus grand les portes du monde au raï en travaillant avec, entre autres, Sting.

En peu de temps, le raï est devenu l'un des grands ambassadeurs de l'Algérie à travers le monde et une des preuves de la vivacité de la culture algérienne. C'est sûrement pour cela que nombre de ses représentants ont été la cible des terroristes dès le début des années 1990 dont certains furent les victimes, comme Cheb Hasni, le chanteur emblématique assassiné en 1994 et dont la mort est toujours pleurée.

Aujourd'hui, le raï continue de rencontrer tous les styles du reggae au rap, en passant par le R'n'B...

Dans les années 1980, le groupe de raï Raina Raï, originaire de Sidi Bel Abbès, a été un des premiers groupes de raï à bousculer les codes en introduisant guitare électrique et rythmes rock dans le raï.

Parmi les figures contemporaines de ce registre raï fusion, la jeune chanteuse oranaise Yasmine Ammari au répertoire varié, qui va d'un style très variété française à l'électro, connaît un succès grandissant. Son dernier tube est Danser le raï, une chanson festive qui passait encore dans la plupart des mariages pendant l'été 2017.

Par ailleurs, les chanteurs de raï d'aujourd'hui se soucient par ailleurs beaucoup moins des textes que ne le faisaient leurs prédécesseurs, avec des chansons avant tout festives aux paroles peu recherchées voire parfois vulgaires, ce qui fait souvent dire aux anciens que " le raï a perdu son âme ". Vous pourrez juger par vous-même en allant écouter les jeunes talents du raï qui se produisent souvent le soir au théâtre de verdure à Oran pendant l'été.

Messaoud Bellemou : Oran, Longue Distance, 1999.

Reinette l'Oranaise : Mémoires, Blue Silver, 1994.

Aux sources du raï : les cheikhat/chants de femmes de l'Ouest algérien avec Cheikha Rimitti, Cheikha Khaira El-Abassia, etc., Artistes arabes associés.

Cheikha Rimitti, aux sources du raï, enregistrement public à l'Institut du monde arabe. Egalement Le meilleur de Cheikha Rimitti, des enregistrements des années 1980 (Globe Music), European Tour 2000 (Musisoft), Nouar (Sonodisc, 2000), Sidi Mansour (Média 7, 1994), N'Ta Goudami (Toi, face à moi, Because Music. 2005).

(Cheb) Khaled : Kutche (Zone Music, 1988), Didi et N'ssi N'ssi (Barclay, 1992 et 1993), Aiysha (2000), Le meilleur de Cheb Khaled (volumes I et II, Blue Silver), Hafla/Kenza Tour et Kenza (Barclay, 1997 et 1999), Les Années raï (2005), Ana Mardhi Taouel 'M' Galbi (Mpmed, 2006).

Cheb Mami : The Prince of Raï Music/Douni El-Bladi (Blue Silver), Let me raï, Saïda et Meli Meli (Totem Records, 1990 et 1998), Dellali (Virgin, 2001) et Le Meilleur (compilation, Virgin, 2002), Live au Grand Rex (DVD, EMI, 2004).

Cheb Hasni : Raï Love (Voix du Maghreb VDMA), Gualou Hasni Met et Ala Besse (Blue Silver), Cheb Hasni (Super Bazar Suba), Nti Nti mon amour (Créon Music), Best of (Fassiphone) et 8 ans déjà/Succès (MWD, compilation éditée à l'occasion du 8e anniversaire de la mort de Cheb Hasni).

Le monde du raï des années 50 à nos jours, compilation, Blue Silver.

L'Officiel du raï, volume I, Maghreb World Development. Très intéressant parce le disque réunit des interprètes très variés, de Cheb Hasni à Bilal en passant par Chaba Zahouania ou Cheikha Rimitti.

Fiha Dauphin de Houari Dauphin, Créon Music, 2002.

Un homme libre de Cheb Sahraoui et Cheb Maghni, Musisoft, 2000. Raï et salsa.

Sidi Sidi de Bilal (Polydor, 2002).

Faudel : Bled Memory (Universal, 2010).

Absolute Raï, compilation, Virgin.

Reda Taliani : Nabghik, Aladin le Musicien, 2005.

Raïna Raï : Zina (1983), Raïna Hack (1985), Chouli (1986), SAF (1987), Waïlé (1988), Ghaba (1989), Rana H'na, Datni.

Houari Benchenet : Dalali (1977), Rani m'damar (1989), Arssam Wahran (2001), N'tiya Omri ya l'Algérie (2010).

Arssam Wahran : une chanson de 12 minutes sur Oran

Interprétée par le chanteur oranais Houari Benchenet sur une musique du regretté Blaoui el Houari, la chanson Arssam Wahran raconte l'Oran des années 50 pendant 12 minutes. C'est en réalité un poème de Nouna Mekki qui est mis en chanson, une véritable balade musicale dans cet Oran d'antan.

Cette promenade en chanson commence par le quartier de Sidi el Houari, se poursuit par Santa Cruz, la cité Maraval, le quartier Gambetta, Saint-Eugène etc.

Arssam Wahran est donc plus qu'une chanson, c'est une histoire qui se vit au rythme des intonations de la voix sirupeuse de Benchenet et des arrangements musicaux qui s'inspirent du Wahrani un style devenu une école grâce à Wahbi ou encore Blaoui el Houari.

Pour ceux qui comprennent l'arabe dialectal algérien, ce sera un régal mais même si on ne comprend pas, on se laisse facilement bercer par la jolie mélodie du morceau et la belle voix d'Houari Benchenet.

Si vous souhaitez faire tout le parcours de la chanson, à condition de comprendre la langue bien sûr, il faut compter environ 2 heures de voiture, en roulant en dehors des heures de pointe donc en évitant la circulation.

Blaoui el Houari (1926-2017)

Décédé en juillet 2017 à Oran où il était né, Blaoui el Houari était un des piliers de la chanson oranaise qu'il a révolutionnée en la réinventant. Il a composé de très belles chansons du répertoire algérien comme Rani Mhayer, Biya Daq el mor, Esmaa ou El Hmama et beaucoup d'autres.

Le répertoire de Blaoui Houari compte plus de 500 titres qui ont influencé beaucoup de chanteurs du Rai très connus dont Cheb Khaled, Houari Benchenet et Cheb Mami.

Parmi les faits marquants dans sa carrière, il a notamment dirigé l'orchestre de la chaîne de TV régionale RTA après l'indépendance. En 1970, il participe durant sept mois à l'animation de l'ensemble musical algérien qui se produisait à l'exposition universelle d'Osaka, au Japon.

Blaoui el Houari est inhumé au cimetière de Ain El Beïda à Oran. Peu après sa mort, un vibrant hommage lui a été rendu au festival de la chanson oranaise en août 2017.

Trois figures historiques de la musique oranaise

Reinette l'oranaise

Reinette Sultana Daoud est née en 1915 dans une famille juive d'origine marocaine à Tiaret dans la région d'Oran. Devenue aveugle à l'âge de deux ans, son avenir est incertain mais c'est sa mère qui la fait initier à la musique arabo-andalouse. Elle intègre à 13 ans l'orchestre de Saoud l'Oranais qui lui donne son nom et enregistre un premier disque en même temps qu'elle apprend à jouer de plusieurs instruments (derbouka et oud). Dans les années 1940, elle quitte Oran pour Alger où elle se fait connaître en animant une émission de radio et des soirées. Par la suite, elle enregistre de nombreux disques et devient l'une des voix les plus connues de la musique arabo-andalouse. Elle est morte en novembre 1998 à Paris.

Cheikha Rimitti

Saâdia Bediaf est née le 8 mai 1923 à Bouni, près de Sidi-Bel-Abbès. Elle commence à danser, chanter et jouer du bendir (tambourin) sous le nom de El-Ghilizania, " celle de Relizane ", dans les mariages et les fêtes populaires et suit des troupes de musiciens au hasard de leurs galas dans l'Oranais (" Je participais aux fêtes en l'honneur des saints, entre Relizane, Oran et Alger. On invitait les plus grandes chanteuses, comme Oum Kalthoum ou Cheikha Fadela la Grande, " je montais à cheval lors de la fantasia, avec un fusil dans chaque main et je tirais ", racontait-elle). A la source du raï, elle chantait le statut de la femme, l'amour ou le plaisir charnel, s'attirant une réputation sulfureuse. Son premier disque est enregistré en 1936 chez Pathé mais elle doit attendre 1954 pour rencontrer le succès avec un titre osé qui dénonce le tabou de la virginité (Charak, guetaâ, " Déchire, lacère "). Ses chansons sont même censurées par le FLN après l'Indépendance ! La future Cheikha (" maîtresse ") adopte le surnom de Rimitti à cette époque : voulant offrir une tournée à des admirateurs, elle lance un soir " Remettez, remettez " au patron du bar, ce qui sonne " Rimitti " avec l'accent...

Après une longue carrière exigeante qui s'est poursuivie en France, elle s'est éteinte le 15 mai 2006, quelques heures après s'être produite au Zénith de Paris au côté de Khaled. Elle a été enterrée au cimetière d'Aïn El Beïda près d'Oran. Celle qui fut la " mamie du raï " - elle se plaignait d'ailleurs d'avoir été pillée - se produisait régulièrement en public, dans des soirées privées comme dans de grandes salles et avait sorti un nouveau disque fin 2005 (N'Ta Goudami, " toi, face à moi ", Because Music).

Cheb Hasni

Hasni Chakroune est né le 1er février 1968 dans le quartier Gambetta à Oran. Il apprend le chant lorsqu'il intègre la chorale de son école, arrête tôt ses études pour devenir footballeur. A seize ans, il se produit dans des soirées et des fêtes où il reprend, entre autres, les succès de Cheb Khaled. En 1986, après avoir été remarqué par un producteur, il chante Barraka m'ranka en duo avec Zahounia, une chanteuse déjà célèbre, et commence une carrière prometteuse dans le pop raï. Ses tubes (Tal ghiabekya ghzali, Malabki ma îgouli hada makîoubi, Visa, Ki mtfakar, Khalitlek Amana ou Gaâ N'sa) évoquent les difficultés de vivre des jeunes Algériens, déchirés entre le poids des traditions et la modernité. Celui qu'on appelait le prince du raï ou le Julio Iglesias oranais, tant pour son charisme que pour le nombre de ses succès, a connu la fin tragique d'un conte de méchantes fées. En 1991, il chante Ils ont dit que Hasni est mort (Gallou Hasni mat) après la mort d'un chanteur portant le même nom que lui, trois petites années avant que des balles intégristes l'assassinent, le 29 septembre 1994, en bas de chez lui à Oran dans le quartier de Gambetta.

Peinture et arts graphiques
<p>Le Passage d'otoctone, oeuvre du mouvement Tadyert.</p>

Le Passage d'otoctone, oeuvre du mouvement Tadyert.

Calligraphie

L'islam interdisant toute représentation du vivant, c'est au travers des ornementations florales et géométriques mais plus encore par la calligraphie que se sont d'abord exprimés les artistes musulmans. Le Prophète aurait d'ailleurs dit qu' " une belle écriture met la vérité en évidence ". Très respectés, les calligraphes décoraient les lieux de prière avec des extraits du Coran, suivant différents styles ou écoles, puis les textes ont orné les poteries ou les carreaux de céramique.

Un des plus grands calligraphes algériens est Noureddine Kour et c'est un Oranais. Pendant l'été 2017, le nouveau musée d'art moderne d'Oran, ou MAMO, a exposé un grand nombre de ses oeuvres.

Céramique

Avec des motifs géométriques ou fleuris, acceptés par l'islam, à dominante bleue et ocre, c'est dans les maisons et les palais que la céramique a trouvé sa place à partir du IXe siècle apr. J.-C. Il reste malheureusement assez peu d'exemples " d'époque " mais les restaurateurs s'emploient à perpétuer cet art de la décoration.

Dessin

Vu le dynamisme de l'école supérieure des beaux-arts d'Alger, on devine que la tradition picturale est très vivace en Algérie même si on s'en rend assez peu compte dans la rue.

Pourtant, c'est peut-être au travers du dessin de presse qu'on découvre le mieux cette expression. Chaque journal a son dessinateur mais le plus connu d'entre eux reste encore Dilem, le caricaturiste du journal Liberté qui dessine également pour la chaîne internationale française TV5 Monde.

A Oran, au café littéraire et artistique, le Manifeste, il est possible de découvrir de nombreuses oeuvres de jeunes dessinateurs de la ville.

Peinture

L'islam interdisant toute représentation des êtres vivants, l'art islamique a trouvé son expression dans les formes géométriques complexes, la représentation des végétaux et la calligraphie.

Au XIXe siècle, ce sont les peintres occidentaux qui ont mis en scène l'Algérie au travers notamment du courant orientaliste mis à la mode par des peintres comme Delacroix (Femmes d'Alger dans leur appartement). A l'hôtel Royal au centre-ville d'Oran, un hôtel historique de la ville, vous pourrez observer plusieurs oeuvres de style orientaliste dans le lobby et les couloirs.

Le XXe siècle voit naître, avec les premiers mouvements nationalistes, des artistes talentueux, libérés des interdits de la religion. Aujourd'hui, peintres, sculpteurs et photographes exposent leurs oeuvres librement dans les galeries et centres culturels du pays.

Parmi les grandes figures de la peinture algérienne contemporaine, Rachid Talbi, un peintre figuratif oranais, à la fois réaliste et impressionniste expose régulièrement à Oran et dans toute l'Algérie. Il a réalisé de nombreux tableaux sur Oran et Tlemcen (dont vous pourrez voir des reproductions dans ce guide). Certaines de ses oeuvres sont même exposées à la résidence du président Bouteflika. Il est possible de rendre visite à Rachid Talbi à son atelier à Oran et même de lui acheter des toiles, pour le contacter : [email protected]

Le mouvement Tadyert. Créé en 2003 par un groupe de six jeunes peintres oranais (Abdellah Ouldamer, Saïd Ouslimani, Fethi Abou, Farid Mesli, Miloud Taibi et Cherif Belzina), le courant artistique Tadyert - qui signifie " sublime " - est un courant majeur dans l'histoire de l'art de l'Algérie.

Entre le figuratif et l'abstrait, le Tadyert se caractérise par des couleurs leur vives et une abondance de signes. Parmi ces peintres du mouvement Tadyert, l'oranais Abou Fethi est un des plus connus, il a déjà exposé à Oran, Alger et Dubaï.

Du 1er décembre 2017 au 1er janvier 2018, une exposition consacrée au Tadyert au musée d'arts modernes d'Oran présentera plusieurs oeuvres de ce mouvement artistique né à Oran.

Pour plus d'informations, vous pouvez contacter directement Abou Fethi : [email protected]

Traditions

La fantasia, devenue rare mais toujours organisée du côté de Tiaret, est un spectacle au cours duquel des cavaliers, vêtus de leurs plus beaux atours, mènent une charge héroïque, montés sur leurs fidèles destriers (eux-mêmes parés de harnais somptueux et de décorations multicolores), accompagnés des youyous des femmes de l'assistance et de l'odeur de poudre que répandent les moukkalas, ces longs fusils incrustés de pierreries qu'on tire vers le ciel (baroud)...

On peut assister à une fantasia au cours d'un moussem.

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