Leitfaden du Berry : Histoire
Il n'est pas évident de dresser un état des lieux de la région berrichonne au temps de la Préhistoire. En effet, les documents relatifs au Berry ne remontent pas au-delà du Ve siècle avant Jésus-Christ, c'est-à-dire il y 2 500 ans environ. Le Berry préhistorique reste donc empreint de mystères, même si de grandes lignes peuvent en être tracées. La Préhistoire se divise en quatre grandes périodes : l'âge de la pierre taillée, l'âge de la pierre polie, l'âge du bronze et l'âge du fer.
Le Paléolithique (âge de la pierre taillée) a connu deux époques distinctes, chacune marquée par ses spécificités. La période diluvienne, comme son nom l'indique, a connu de très fortes pluies. Les cours d'eau étaient abondants, les sommets des montagnes étaient couverts de glaciers résistants. Les immenses prairies et les vastes forêts étaient peuplées de nombreux animaux : lions, panthères, mammouths, aurochs, rennes... Aujourd'hui, bien sûr, ils ne sont plus établis dans le Berry (le mammouth a d'ailleurs totalement disparu de la surface de la terre). De cette époque lointaine subsistent dans les plaines et les forêts berrichonnes les cervidés, les équidés et les caprins. Les habitants de la région les chassaient à l'aide d'armes constituées d'un morceau de bois au bout duquel étaient fixés des silex taillés. Les températures étaient relativement douces. Elles ont fortement baissé à la période glaciaire. Cette ère très froide a vu disparaître de nombreux animaux. Le renne, en revanche, bien adapté à ce climat rigoureux, prospéra. Les hommes se perfectionnèrent dans la taille des silex mais utilisèrent également d'autres matériaux (os, corne...). Ils se nourrissaient de fruits, de racines, de feuilles, du produit de l'élevage et de la chasse. Les " Berrichons " de l'époque vivaient dans des cavernes. Des restes de l'âge paléolithique ont ainsi été retrouvés dans le Cher et dans l'Indre, à Farges-Allichamps, Crosses, La Celette, Saint-Marcel, Saint-Benoit-du-Sault et Levroux notamment. On trouve dans le nord-est du département de l'Indre des excavations qui peuvent faire penser à l'habitat de cette période. Il ne s'agit toutefois à priori que d'excavations causées par l'érosion du calcaire.
L'outillage des hommes se perfectionne encore. La poterie d'argile fait son apparition, de même que des outils et des armes de plus en plus aboutis. Les cavernes sont quittées pour des habitats construits. Les cromlechs (menhirs disposés en cercle) de Moulins, Ciron et Lourdoueix-Saint-Michel datent de cette époque. Les menhirs isolés d'Allouis, de Menetou-Salon, de Plou, de Saint-Georges-sur-Moulon, de Giroux, de Mauvières, de La Châtre-Langlin, de Vouillon, de Bagneux, de Bommiers, de Chaillac... sont des vestiges de cette époque. On trouve ainsi dans le département de l'Indre aujourd'hui une quarantaine de menhirs. Les dolmens sont assez nombreux dans l'Indre, à Arthon, Lucay-le-Libre, Mauvières, Montchevrier, Saint-Plantaire, Nuret-le-Ferron, Douadic, Ceaulmont, Châtillon-sur-Indre, La Châtre-Langlin, Oresennes, Parnac, Bagneux... On en trouve beaucoup moins dans le Cher, à Graçay, Saint-Maur, Quincy. Si ces pierres pouvaient parler elles nous raconteraient la culture du blé, de l'orge, du lin... et l'apparition du pain.
La période du Ve au IIe siècle avant J.-C. fut marquée par l'arrivée de peuplades venues de l'Est (d'Europe centrale et d'Asie). Les Celtes, l'une de ces tribus, auraient introduit les techniques de travail du bronze. Il détrôna la pierre et l'os pour la confection d'outils, comme les couteaux, les marteaux, celle d'armes (poignards, épées, lances, flèches) et celle des parures (bijoux). Le bronze fut ensuite détrôné par le fer, plus résistant. C'est l'époque des tumulus, tombeaux constitués de monticules de pierre. Dans le Berry ces tertres funéraires, appelés tombelles, se trouvent à Dun, Ineuil, Ids-Saint-Roch, Saint-Baudel, Fontjames, Ménéol-sur-Sauldre, Primelles, Foëcy, Argenvières, Saint-Pierre-les-Etieux, Thénioux, Touchay (dans le département du Cher), et Celon, La Champenoise, Jeu-les-Bois, Mers-sur-Indre, Migny, Pellevoisin, Roussines, Vigoux, Ajouin, Giroux, Tilly, Le Magny, Murs, Prissac, Ruffec-le-Château, Saint-Michel, Liniez, Moulins près Levroux (pour le département de l'Indre).
Des silex taillés datant de 2,3 millions d'années ont été retrouvés dans le Sancerrois. Ce sont les plus anciens d'Europe. Ils étaient logés dans des sédiments qui se trouvent autour du lit de la Loire, anciens alluvions venus du Massif Central il y a trois millions d'années. De nombreux silex taillés ont été retrouvés dans le Sancerrois et au Nord du Cher. Bien sûr, tous ne sont pas si anciens. Ils ont été confectionnés sur une période qui s'étend d'il y 40 000 ans à 2,3 millions d'années.
Le Berry tire son nom du peuple gaulois qui y a élu domicile avant la conquête romaine vers 500 avant J.-C : les Bituriges Cubi. La cité capitale de cette peuplade établie entre la Loire et le Massif Central est la Bourges actuelle, Avaricum à l'époque, en référence à la rivière Yèvre (Avara). Le territoire occupé par les Bituriges Cubi n'est pas tout à fait identique au Berry actuel. En effet, il s'étend sur le Cher, le sud de l'Indre et pousse jusqu'à une partie du Limousin. Ce territoire était entouré par les Carnutes (à partir de Vierzon), les Eduens à l'est (l'Allier servait de frontière) et les Boiens au sud. Il semble que les Bituriges aient eu commerce avec les Eduens, un peuple puissant en Gaule. En -52 un chef arverne les convainc de s'allier à Vercingétorix. Une bonne partie des combats se déroulera sur leur territoire.
Quand Vercingétorix décide de pratiquer la politique de la terre brûlée, pour ne laisser aux Romains que cendres, désolation et aucune possibilité de ravitaillement il épargne Avaricum. Il s'agit là d'une curieuse décision de la part d'un chef de guerre qui n'hésitait pas à détruire toute possibilité pour les Romains de s'approvisionner. César évoque une décision infléchie par les demandes des notables bituriges, qui l'auraient supplié d'épargner la ville. Des historiens penchent plutôt pour une tactique délibérée visant à obliger les Romains à faire le siège de la ville, siège qui devait les affaiblir. Ce sont finalement les troupes de César qui mettront la ville à sac, après un siège qui dure de longues semaines. En entrant dans la cité, ses soldats la pilleront et presque toute la population (40 000 personnes) sera massacrée, hommes, femmes et enfants. D'après les écrits de César seuls huit-cent guerriers bituriges parvinrent à prendre la fuite pour rejoindre l'armée gauloise. Ils combattront avec d'autres Bituriges (12 000 au total) aux côtés de Vercingétorix lors du siège d'Alésia en 52 avant J.-C.
La défaite de Vercingétorix à Alésia lance la mainmise de Rome sur la Gaule. César fera construire une nouvelle cité sur les ruines d'Avaricon : Avaricum. Les Bituriges se soumettent à César, qui leur viendra en aide quand, pour une raison inconnue, leurs voisins du Nord, les Carnutes, les attaqueront. Peu de temps après cet épisode le peuple biturige se scinde : les Cubes restent à Avaricum et aux alentours, les Vivisques partent vers la Gironde où ils fondent Burdigala, l'actuelle ville de Bordeaux.
Les routes gauloises qui traversaient le territoire des Bituriges Cubi perdurent pendant l'Empire romain. Modernisées, elles deviennent des voies romaines. Les principales, agrémentées de routes secondaires, relient l'actuelle Tours à Autun en passant par Bourges et Poitiers à Clermont-Ferrand, puis Lyon.
Les Bituriges, qui cultivaient de l'orge, du chanvre et du lin étaient passés maîtres dans l'art de de la métallurgie. Une épée courte en fer, découverte en 1886 à Châtillon-sur-Indre, passe pour l'une des plus belles et des plus remarquables du monde celtique. On attribue à ce peuple la découverte de la technique de l'étamage.
Après la conquête romaine, le territoire qui correspond au Berry actuel se remet des années de guerre. Avaricum prospère. La ville avait ses arènes, son capitole, son forum, ses thermes, son marché couvert (basilique) et ses temples. Plusieurs édifices superbes, construits et décorés à la romaine, bordaient ses rues. Les arènes se trouvaient un peu à l'extérieur de la ville, à l'emplacement de l'actuelle place de la Nation. Des représentations théâtrales y étaient données régulièrement, attirant un public nombreux. La ville était fournie en eau par quatre aqueducs.
Mais, à partir du IIIe siècle, les invasions barbares mettent le pays à feu et sang. Les années 407 et 408 furent marquées par l'arrivée des Vandales, Suèves, Alains et Burgondes qui envahirent la Gaule. Située au centre du territoire et particulièrement prospère, la région berrichonne pâtit fortement de ces invasions. Les forêts du Berry se peuplèrent de nombreuses personnes qui y trouvèrent refuge, les autres préférant se rendre dans les villes, places fortes. Les habitants des forêts se réunirent en bandes, qui très vite pillèrent les environs afin de trouver de quoi subsister. Les Romains matèrent rapidement ces soulèvements épars. L'actuel centre de la France se trouve pris en étau entre, d'une part les Wisigoths venus d'Espagne, les Burgondes, qui arrivent de Germanie (Allemagne) et les Francs. Les Wisigoths remportent la bataille et s'établissent de force dans la région, chose que les Romains ne pouvaient laisser faire. Douze mille Bretons furent réquisitionnés pour venir chasser les Wisigoths du Berry, ils furent battus près de Déols.
Les Bituriges, avec le concours de leurs alliés les Arvernes, ont résisté vaillamment aux barbares. Ce n'est qu'en 475 que l'autorité wisigothe a été reconnue dans le Berry, après la soumission de l'Auvergne. Les Wisigoths, rancuniers après la résistance arverne et biturige, se montrèrent particulièrement cruels avec les chefs de ces deux peuples. Un sénateur biturige aurait ainsi été supplicié à Clermont, attaché à une vieille muraille pour en être littéralement broyé par les pierres que les Wisigoths firent s'écrouler sur lui. Les invasions des Francs succédèrent à celles des Wisigoths. La victoire de leur roi Clovis sur Alaric II à Vouillé fut le point de départ de la domination franque dans la région berrichonne.
L'ère mérovingienne fut marquée par le retour des Wisigoths en Berry, quand Childebert, roi franc quitta la région pour se rendre en Auvergne. Les Wisigoths en profitèrent pour revenir dans le Berry et le mettre à feu et à sang.
Le Berry souffrit ensuite d'une guerre fratricide entre Gontran et Chilpéric, les fils de Clotaire Ier. Le Berry était alors devenu la possession de Gontran, roi de Burgondie. Chilpéric, roi de Neustrie, qui convoitait l'Aquitaine, propriété de Gontran, envahit le Berry. Les environs de Châteaumeillant se couvrirent alors des troupes de Chilpéric. Les heurts furent violents entre ces hommes venus du Limousin et de Guyenne et les quinze mille Berruyers envoyés pour défendre le territoire. Grégoire de Tours raconte que la bataille fut tellement acharnée que chaque camp dut déplorer la mort de 7 000 hommes. Les Berruyers, moins nombreux, furent obligés de se replier et gagnèrent Bourges. Les Neustriens se lancèrent alors à leur poursuite, dévastant tout sur leur passage. Les maisons furent rasées, les vignes détruites, les églises pillées et incendiées, les villages mis à sac. Grossis des effectifs d'une armée neustrienne venue du Poitou, les hommes de Gontran arrivèrent jusqu'à Bourges. Le siège de la ville commença. A l'intérieur de la ville, les Berruyers s'étaient préparés à résister. Les affrontements n'eurent finalement pas lieu : en apprenant que Chilpéric s'était fait battre par Gontran près de Melun les Neustriens se retirèrent, non sans laisser désolation sur leur passage.
Les années suivantes, les Berruyers accompagnèrent Gontran dans sa guerre contre les Tourangeaux et les Poitevins. Ils vainquirent dans un premier temps les Tourangeaux, qui les rejoignirent dans la bataille, ce qui leur permit d'écraser les Poitevins. Le roi Gontran appela par la suite les Berruyers à venir guerroyer pour son compte en Aquitaine. Le premier des comtes de Bourges, Ollon, s'est taillé une petite réputation à cette époque, par sa participation aux combats.
Ces temps troublés étaient propices à l'émergence de la religion. Vers le milieu du IIIe siècle, alors que le Berry est encore sous domination romaine, Saint-Ursin arrive chez les Bituriges. A Bourges, où il s'installe, il procède à de nombreuses conversions. Il se tourne vers Léocadius, riche et influent sénateur des Gaules, pour que ce dernier mette à la disposition des nouveaux chrétiens un local dans lequel se rassembler. Les nouveaux convertis étant très pauvres, esclaves ou citoyens désargentés, il ne leur est pas possible d'avoir un lieu où se retrouver. Léocadius, qui se fit baptiser par la suite, leur donna son palais de Bourges. L'actuelle cathédrale a été édifiée sur le site qu'occupait ce palais au temps des Bituriges. Le fils de Léocadius se convertit également, aujourd'hui son tombeau se trouve à Déols, dans le caveau de l'église Saint-Etienne. De la montée du christianisme en Berry subsistent deux légendes : celle du martyre de Saint-Marcel et la légende de Sainte Rodène (voir encadrés).
A l'instar de la Gaule le Berry devint rapidement une terre chrétienne. Chaque paroisse éleva son église. A Bourges, Charenton et Massay de beaux monastères sortirent de terre. Chaque cité gallo-romaine forma un diocèse, géré par un évêque, tandis qu'un évêque métropolitain fut installé à la tête de chaque province. Bourges était le siège de la province chrétienne. Elus, les évêques détenaient un important pouvoir politique. Leur rôle pendant les terribles invasions barbares fut important ; ils exercèrent leur pouvoir en tentant de soulager les malheurs des populations.
Il se dit que la prise d'Avaricon (anciennement Bourges) par les légions de César aurait permis au chef de guerre romain de vaincre Vercingétorix à Alésia. En effet, épargnée par le Gaulois, Avaricon aurait fourni aux soldats romains les vivres et les ressources qui leur faisaient défaut, leur permettant ainsi de reprendre des forces pour continuer leur avancée en Gaule.
Le chrétien Marcel avait fait le voyage en Gaule depuis Rome pour y retrouver sa mère et ses deux frères. Il était accompagné d'un autre converti : Anastase. A Argenton il poussa de nombreuses personnes à se convertir. On raconte qu'il accomplit des miracles, notamment la guérison d'un pauvre enfant sourd, muet et boiteux. Le prêteur romain Héraclius ne voyait pas d'un bon oeil le succès remporté par Marcel. Il le fit arrêter et tenta de l'obliger à renier sa foi. Marcel refusa. Il fut alors torturé, battu, brûlé, allongé sur un grill. Aucun de ces terribles traitements n'eut raison de la foi de Marcel. On raconte qu'il fut alors jeté dans une marmite de soufre, de poix, d'étoupe et de bitume bouillants. Il fut ensuite décapité sur une colline. Anastase, son compagnon, mourut en même temps que lui. Le village qui se trouve sur la colline, théâtre de la décapitation du chrétien, porte aujourd'hui le nom de Saint-Marcel. Dans cette commune se trouvent les ruines d'une tour, appelée la tour d'Héracle.
Rodène était une jeune fille de Gabatum (aujourd'hui Levroux). Elle se fit baptiser par saint Sylvain et saint Sylvestre, envoyés, dit-on, par saint Pierre lui-même pour convertir les peuples des Gaules. Rodène prit la route avec Sylvaine et Sylvestre mais son mari, Corusculus, irrité de ce départ, la pourchassa avec une troupe armée. Rodène les aperçut qui arrivaient sur elle et son compagnon. Alors, saisissant une paire de ciseaux, elle se mutila horriblement, se coupant au visage, le nez, les lèvres et les oreilles. Elle marcha ensuite, en sang, vers son époux. Horrifié, ce dernier la repoussa violemment. Alors, on raconte que saint Sylvain guérit miraculeusement ces terribles blessures. Ce miracle ne convainc pas Corusculus qui fit demi-tour avec ses cavaliers. Mais très vite les pattes de leurs chevaux se dérobèrent : les bêtes, sans force, s'écroulèrent. Alors Corusculus et ses cavaliers rejoignirent à pied les deux saints et Rodène, les implorant de les baptiser. Dans la foulée tous les habitants de Gabatum se convertirent. Une église fut élevée dans le village, édifice qui attira de nombreuses personnes souhaitant profiter des miracles de saint Sylvain. Aujourd'hui encore saint Sylvain est le patron de l'église de Levroux. On prête aussi aux eaux de la fontaine de Sainte-Rodène, située non loin, des vertus guérisseuses exceptionnelles.
Le Berry a fait d'une jeune bergère sa sainte patronne. La jolie Solange naît près de Bourges, à Val-Villemont. Enfant, elle se passionne pour la vie de sainte Agnès, que lui lit son père à la veillée, à la lueur du feu. Quand elle garde ses brebis, l'enfant croit voir sainte Agnès à ses côtés. En grandissant, Solange devient un véritable modèle de bonté et de vertu, n'ayant de cesse de parcourir la campagne pour aider les pauvres. On raconte que le blé des champs s'inclinait devant elle pour déposer ses grains dans sa main tendue, et que les plus beaux épis renaissaient tous seuls derrière ses petits pas. On lui attribue les années suivantes de nombreux miracles. Elle guérit les infirmes, écarte les orages, chasse les démons. Sa renommée est telle qu'elle dépasse les frontières de sa campagne et arrive aux oreilles de Bernard, comte de Poitiers et de Bourges, prince du pays. Il part à la recherche de cette merveilleuse jeune fille et la découvre en prière. Emerveillé, il tombe éperdument amoureux d'elle et se jure de l'épouser. Il attend le printemps, et se rend dans la prairie où elle fait paître son troupeau. Il l'aborde, déclare sa flamme, lui offre son coeur mais aussi ses propriétés, dont Bourges. Solange refuse. " Mon coeur est à Jésus ", lui répète-t-elle inlassablement. Le prince veut alors la prendre de force ; la bergère s'enfuit. Bernard la pourchasse à cheval, la rattrape près d'une rivière, la saisit et l'installe sur sa monture. Mais Solange s'enfuit à nouveau. Furieux de voir lui échapper celle qu'il convoite Bernard tire son épée et d'un coup sec amené par la rage lui tranche la tête. On dit que la tête coupée de Solange prononça trois fois le nom de Jésus. Une commune du Berry s'appelle aujourd'hui Sainte-Solange.
Le Berry est indissociable de l'histoire des Capétiens à partir de 1100. Rattaché au domaine royal, il est érigé en duché en 1360, quelques années après le commencement de la guerre de Cent Ans (1337). Un duché que le roi Jean II le Bon confie en apanage à son fils Jean 1er de Berry. Le duché revient dans le domaine royal à la mort de ce dernier, avant d'être confié successivement aux deux fils du roi Charles VI, Jean, dans un premier temps, puis Charles, futur Charles VII.
Charles dit le Victorieux ou encore le Bien-Servi trouve refuge dans le Berry en 1418, en s'établissant à Bourges. Il a alors 15 ans et fuit Paris, envahi par les Bourguignons, menés par Jean Sans Peur, qui n'ont qu'une idée en tête : le faire captif. La guerre de Cent Ans fait rage, les Bourguignons, alliés aux Anglais, leur permettent d'avancer plus avant sur les terres françaises. En 1420 Henri V d'Angleterre réussit même à arracher la couronne de France pour son fil, Henri VI qui n'est alors qu'un bébé de 9 mois. L'état de santé de Charles VI de France, qui a basculé dans la folie, a facilité la conquête anglaise.
Mais Charles VII n'entend pas voir le royaume qui lui revient passer sous domination anglaise. Depuis Bourges il se proclame Régent du Royaume de France en 1422.
Sa rencontre avec Jeanne D'Arc sera décisive. Charles VII décide de faire confiance à la jeune bergère originaire de Domrémy et l'envoie à Orléans, que les Anglais assiègent. On connaît la suite. La jeune femme y remportera une première victoire, en forçant les Anglais à lever le siège. Dans la nuit du 7 au 8 mai 1429. Les succès militaires suivant donneront à Charles VII la légitimité qui lui faisait défaut et, sous l'impulsion de Jeanne d'Arc il acceptera d'aller se faire sacrer à Reims en 1429. Surnommé le " petit roi de Bourges " par ses détracteurs, il continuera la reconquête des territoires qui lui reviennent, aidé financièrement par son grand argentier, Jacques coeur (voir encadré). Même si par la suite Charles VII est fort occupé à reprendre le contrôle du royaume de France il retournera très souvent dans le Berry, une région dont il apprécie les paysages, notamment pour se rendre auprès de sa maîtresse favorite, la belle Agnès Sorel, à laquelle il a offert le domaine d'Issoudun, dans l'Indre. En 1453 la fin de la guerre de Cent Ans marque la victoire de Charles VII après la capitulation des Anglais à Bordeaux. Charles VII meurt le 22 juillet 1461 dans le Berry, à Mehun-sur-Yèvre. Son fils, Louis XI, né à Bourges, lui succède.
Au lendemain de la guerre de Cent ans, le Berry connaît une paix relative. Les terribles combats restent présents dans les esprits, mais il ne reste que leurs souvenirs, sous la forme d'affreux cauchemars. L'économie reprend ses droits : l'agriculture, l'industrie et le commerce renaissent de leurs cendres. Le roi Louis XI accorde quelques faveurs à la région. Non parce qu'il y était attaché, en dépit de sa naissance à Bourges, mais par calcul. Il semble en réalité qu'il garde une dent contre Bourges pour la fidélité inébranlable dont la ville a fait preuve à l'égard de Charles VII.
Louis XI donne le Berry en apanage à son jeune frère Charles. Ce dernier se laisse rapidement entraîner par la Ligue du bien public, avec plusieurs seigneurs de la province et le duc de Bourbon. Louis XI est obligé de venir en terres berrichonnes avec une armée, pour mater le soulèvement. Il savait qu'il pouvait compter sur un bon accueil à Issoudun, Déols et Vierzon, cités qui lui étaient fidèles. Il s'y basa donc, prit Saint-Amand d'assaut, Montrond capitula. Pour renforcer sa position Louis XI installa des garnisons dans les villes stratégiques de la région, afin d'exercer une surveillance constante sur Bourges, dont il se méfiait. En poursuivant sa route jusqu'à Montluçon, qu'il prit, il obligea le duc de Bourbon à lui faire allégeance. Il reprit à Charles la province berrichonne et lui donna le duché de Normandie.
L'industrie du drap était très importante à Bourges au Moyen Age. En 1407, sous le règne du roi Charles VII, les maîtres drapiers locaux dépêchèrent à Paris un de leurs représentants, Aubert Gimart, afin qu'il contribue, à l'occasion d'un congrès, à rédiger les statuts de la corporation. La guerre de 100 ans les obligea à réduire de façon tout à fait drastique leur activité. A la fin des conflits, sous le règne de Louis XI, elle reprit son essor. Les métiers qui la constituaient furent recodifiés et Louis XI encouragea fortement la fabrication de draps, de bonnets et de chapeaux. Il ordonna même que des maîtres et compagnons drapiers de Bourges se rendent à Arras pour une formation aux techniques des maîtres du Nord. Les draps de Bourges se taillèrent bien vite une solide réputation et se vendirent dans tout le royaume, mais aussi à l'étranger. Ils étaient si solides qu'on raconte qu'un manteau réalisé en drap du Berry se passait dans une famille entre les différents enfants.
A la fin du XVe siècle Bourges compte parmi les villes les plus florissantes du royaume pour le commerce et l'industrie. Dès le début du règne de Charles VIII ses foires attiraient une foule compacte, venue de toute la France mais aussi de l'étranger. On s'y arrachait les étoffes, les bijoux, les armures. Les familles les plus en vue en matière de négoce quittaient leur domicile et prenait la route pour venir s'établir à Bourges. Mais en 1487 un terrible incendie ravage la ville et met à terre toute cette belle croissance. La moitié de Bourges est détruite en une nuit, le 22 juillet. Les pans de bois et les toitures des maisons s'enflammèrent à toute vitesse : près de cinq mille maisons furent détruites. Le 23 juillet il ne restait plus que leurs fondations, calcinées.
Plusieurs marchands désertèrent la ville qui ne réussit jamais à se remettre de ce sinistre. Les formidables foires qui avaient contribué à la réputation de Bourges se tinrent à Lyon et à Troyes.
Mais les Berruyers ne se sont pas laissés abattre. Ils ont retroussé leurs manches et reconstruit leur cité. Les jolies maisons à pans de bois que l'on peut y admirer encore aujourd'hui datent de cette période de reconstruction, à la fin du XVe siècle.
Charles VIII vint à Bourges peu de temps avant sa mort et la fin de son règne, accompagné d'Anne de Bretagne. On lui montra les bateaux qui commençaient à remonter jusqu'à la ville berrichonne grâce aux travaux de canalisation débutés dans l'Yèvre en 1490.
A Charles VIII succéda Louis XII. A l'époque où il n'était que duc d'Orléans il fut emprisonné à Bourges par le seigneur de Bommiers. Il y resta trois ans et ne dut sa remise en liberté qu'à l'action de sa femme Jeanne de France, la soeur du roi. Il la remercia bien mal. Une fois monté sur le trône il se débarrassa littéralement d'elle en faisant prononcer la dissolution de son mariage afin d'épouser Anne de Bretagne, veuve de Charles VIII. Son but était de garder la Bretagne dans le giron du royaume de France.
Jeanne de France, née en 1464, avait neuf ans quand elle épousa Louis d'Orléans. Il en avait onze. La petite Jeanne n'était pas partie pour devenir une belle femme. Petite, maigre, elle était si laide qu'on raconte que même son père, n'en pouvant supporter la vue, la faisait mettre derrière une dame d'honneur quand il devait lui parler. Les vertus de coeur et d'esprit dont elle faisait preuve ne pouvaient séduire Louis d'Orléans, amateur de jolies donzelles et féru de libertinage, à l'instar de nombreux seigneurs de l'époque. Très vite Jeanne de France fut abandonnée par son époux. Elle trouva refuge dans le Berry, au château de Lignières, demeure où elle avait passé son enfance. Elle s'y forgea très vite une réputation de douceur et de bonté. Quand Louis d'Orléans fut emprisonné à la Grosse Tour de Bourges elle n'eut de cesse de lui rendre visite, de le réconforter et d'implorer son frère, le roi Charles VIII et sa belle-soeur, la reine Anne de Bretagne, d'intercéder en sa faveur. Elle finit par obtenir gain de cause. On connaît de quelle façon Louis d'Orléans, devenu Louis XII, l'a remerciée. Mais une fille de roi ne pouvait rester sans revenus : une fois leur mariage dissous il lui donna le duché du Berry. Jeanne s'installa à Bourges où elle fut bientôt surnommée " la bonne duchesse " en raison des qualités de coeur précédemment saluée par les habitants de Lignières. Très pieuse, elle fonda l'ordre religieux des Annonciades, en honneur à l'Annonciation. Elle meurt en 1405, à l'âge de 41 ans. Deux vers latins situés au début de son testament ont été traduits : " J'étais fille, soeur, épouse de rois de France ; et, si je n'avais été chassée du lit conjugal, un roi de France m'eut appelée sa mère. "
La belle Agnès, maîtresse favorite du roi Charles VII dès 1443, a vécu au château de Dame à Mehun-sur-Yèvre et au château de Loches. Elle a connu une fin des plus tragiques. Enceinte pour la quatrième fois des oeuvres du souverain, elle meurt subitement dans de terribles souffrances en 1450. Elle a 28 ans. Sa fille, née prématurée, décèdera peu de temps après. Son entourage est persuadé que la belle Agnès a été empoisonnée. Les soupçons se portent sur Jacques Coeur, qui avait l'habitude de faire commerce avec la favorite du roi, lui vendant à prix d'or les étoffes somptueuses dont elle raffolait pour la confection de ses toilettes. Le grand argentier est vite blanchi de ces accusations. En effet, il n'avait aucun intérêt à la disparition de sa meilleure cliente. Les soupçons se portent alors sur l'entourage de Charles VII, et en particulier sur le Dauphin, futur Louis XI. Le rôle que la reine Marie d'Anjou aurait pu jouer dans l'élimination de sa rivale est également évoqué. Mais jamais l'origine du décès d'Agnès Sorel ne sera élucidée. Aujourd'hui encore le mystère demeure. Des analyses ont mis en évidence un taux de mercure dans son organisme 10 000 fois supérieur à la dose prescrite à l'époque pour soulager les femmes en fin de couche. La belle Agnès s'est-elle trompée dans son dosage ? Ou le lui a-t-on administré à son insu ? Avant de mourir Agnès Sorel avait donné au roi Charles VII trois filles, Marie de Valois, Charlotte de Valois et Jeanne de Valois, trois " bâtardes " que le roi va finalement légitimer. Outre une influence politique sur son royal amant Agnès Sorel a contribué à dépoussiérer les moeurs de la cour, popularisant une mode composée de robes décolletées sur la poitrine et aux épaules, de coiffures pyramidales et de traînes immenses, parfois jusqu'à 8 mètres de long, confectionnées dans les étoffes et les fourrures les plus précieuses. Elle met également à la mode une cosmétologie raffinée, faite d'onguents au miel, de poudres donnant un teint d'albâtre et de rouge à lèvres à base de coquelicot. Elle lance aussi la tendance des sourcils épilés et du front haut, qui devient le véritable pôle de l'érotisme féminin. Ses détracteurs fustigent ces manières jugées désinvoltes mais le Charles VII n'en a cure. Au contraire, il couvre les épaules et la gorge dénudée de sa belle de pierres précieuses et de diamants.
Berruyer d'origine, Jacques Coeur est né à Bourges en vers 1400. Ce marchand, au destin romanesque, est le précurseur des échanges commerciaux suivis avec d'autres pays du globe, notamment l'Asie. Il réussit à se faire introduire auprès de Charles VII, réfugié à Bourges pour fuir les Bourguignons, alliés des Anglais. Le roi le nomme grand argentier du royaume. L'immense fortune de Jacques coeur lui permet d'offrir un appui très important à Charles VII, essentiel pour la reconquête de son royaume. Mais il ne fait pas bon être plus riche et plus puissant que les membres de la cour et que le roi lui-même. Heureusement, Jacques coeur peut compter sur l'amitié et le soutien d'Agnès Sorel, maîtresse favorite du roi, dont l'influence le protège de la jalousie des conseillers et des craintes que sa puissance peut inspirer à Charles VII. Le décès de la belle Agnès, en 1450, va précipiter la disgrâce de Jacques coeur. Il est même accusé pendant un temps d'avoir assassiné la maîtresse du roi. Même s'il est vite lavé de tout soupçon à ce sujet les rumeurs et les calomnies à son encontre vont bon train. Il est arrêté en 1451 pour malversation et accusé dans la foulée de crime de lèse-majesté. Il est immédiatement emprisonné et ses nombreux biens sont mis sous séquestre. Il réussit à s'échapper en 1454 du château de Poitiers, dans lequel il est détenu. Il gagne alors Limoges, puis Beaucaire avant de prendre la route du sud : la Provence, et de là Rome. Le pape Nicolas V, qui l'apprécie, lui offre le gîte et met ses meilleurs médecins à son service. Remis, Jacques coeur devient alors le conseiller et le financier du pape qui succède à Nivolas V, Calixte III, notamment pour une expédition sur l'île de Chios, menacée par les Ottomans. C'est là qu'il décède, en 1456, sans doute de maladie.
Jeanne de France avait une amie tout aussi infortunée qu'elle en la personne de Charlotte d'Albret, mariée par Louis XII à César Borgia, fils du pape Alexandre VI. Cet aventurier sans scrupules est vite reparti pour l'Italie, abandonnant sa femme et leur enfant. Charlotte d'Albret s'est alors réfugiées au château de La Motte-Feuilly, entre La Châtre et Chateaumeillant. Elle venait souvent à Bourges rendre visite à Jeanne de France. Les deux femmes avaient en commun d'avoir été victimes de Louis XII.
L'industrie du drap berrichonne était si réputée après la guerre de Cent Ans pour la qualité et la solidité de ses tissus que les contrats de mariage de plusieurs personnes bien nées mentionnaient que les parents de la future mariée la " vestiraient de drap du Berry ".
L'Université de Bourges a été fondée en 1463 par le roi Louis XI. On y enseignait la théologie, le droit, la médecine, et les arts (c'est-à-dire les lettres et les sciences). L'autorité du pape lui fut accordée en 1464. Un siècle plus tard le retentissement de cette Université se fit sentir dans l'Europe entière.
Les apothicaires sont les ancêtres des pharmaciens. Le terme a été aboli en 1777 par une ordonnance de Louis XVI qui enjoint de remplacer le terme " apothicaire " par celui de " pharmacien ". Bien avant 1777, au Moyen Age, les apothicaires dans le Berry étaient les moines des abbayes, en particulier les moines de Saint-Sulpice, à Bourges. Ces derniers se sont taillé une petite réputation dans le milieu de la pharmacopée et certaines archives conservent la trace de leurs travaux au XVe siècle. En 1463 l'installation à Bourges de la Faculté de médecine oblige les religieux à passer la main. Dorénavant ce sont les médecins qui ont la mainmise sur l'apothicairerie et la fabrication de remèdes et de drogues.
Cent ans plus tard la profession est réglementée. Par une ordonnance de 1536 François Ier exige que le titre d'apothicaire ne soit délivré qu'après un examen des aptitudes du candidat. A Bourges en 1587 on trouve douze officines. A Issoudun les apothicaires sont associés aux chirurgiens et aux perruquiers, à Vierzon aux chirurgiens, aux barbiers et aux perruquiers, à Selles-en-Berry ils sont associés de façon plus large encore aux médecins, chirurgiens, épiciers, huiliers et potiers d'étain.
L'ancienne apothicairerie de l'Hôtel-Dieu d'Issoudun
Mortiers, bocaux, vases, fioles, faïence de Nevers des XVIe et XVIIe siècles : la pharmacie de l'ancien hôpital Saint Roch offre un vrai voyage dans le temps. Son activité a dû commencer vers 1603. Jusqu'à la fin du XVIIe siècle l'officine s'équipera, se fournira en produits divers pour soigner et soulager les malades de l'hôpital mais aussi une bonne partie de la population de la ville. Elle est aujourd'hui transformée en musée possède un rare recueil manuscrit écrit vers 1720 : Petite pharmacie à l'usage des Filles de la Croix, hospitalières à Reuilly. Les 118 pages de cet ouvrage sont couvertes de recettes pour différents maux, certains élixirs nécessitant parfois l'emploi de pas moins de 72 ingrédients.
Le XVIe siècle est marqué par la guerre de religion qui oppose dans le royaume de France les catholiques et les protestants. Le Berry est un secteur important des conflits, notamment Sancerre, ville huguenote dont la population est en majorité protestante. Sancerre sera d'ailleurs surnommée à l'époque la Petite Rochelle, en référence à la ville de La Rochelle, autre ville du royaume à dominante protestante, où les combats ont également fait rage. Pour comprendre leur genèse et le siège de Sancerre en 1572 et 1573 il faut un peu remonter le temps et revenir au 18 août 1572, date du mariage de Marguerite de Valois (voir encadré) avec Henri de Navarre. Marguerite de Valois est catholique, Henri de Navarre protestant et la reine Catherine de Médicis voit dans cette union une possibilité de réconciliation entre les tenants des deux religions, qui se déchirent en conflits incessants depuis le début du siècle. De nombreux protestants se rendent à Paris pour assister au mariage. Mais au lieu de la pacification tant attendue les festivités précipiteront le pays dans la guerre civile. En effet, la tentative d'assassinat du Duc de Coligny, chef de file huguenot, met le feu aux poudres. Les protestants s'insurgent. Ils réclament vengeance. De nombreux Parisiens sont, eux, fortement opposés aux protestants et ne voient pas d'un bon oeil leur présence dans la ville. La colère enfle et tout bascule dans la nuit du 24 août 1572 que l'Histoire retiendra sous le triste nom de massacre de la Saint-Barthélemy. Des milliers de protestants furent assassinés. Les tueries gagnent d'autres villes, en dépit de l'appel au calme émanant du roi. Le culte protestant est interdit et les protestants fortement encouragés, pour ne pas dire forcés, à se convertir.
Le siège de Sancerre
C'est à ce moment-là que Sancerre devient le théâtre de violents affrontements. La ville est assiégée par les troupes royales. La population, grossie des huguenots fuyant les massacres de La Charité, d'Orléans, de Gien, de Bourges et d'autres villes du Centre, a tenu bon pendant presque huit mois contre les forces catholiques du roi. Il y avait près de 700 soldats à Sancerre. Cent-cinquante vignerons armés de frondes, appelées les pistolets de Sancerre, se joignirent à eux. Tous ces combattants repoussèrent l'assaut. Les femmes leur prêtèrent main forte, en faisant rouler de grosses pierres ou en jetant de l'huile bouillante sur les assiégeants. Le siège se continua. Au bout de quelques mois les Sancerrois manquaient de vivres. Ils commencèrent à tuer les animaux dont ils disposaient pour s'en nourrir. Quand ils n'eurent plus ni ânes, ni chevaux, ni cochons, ils furent réduits à l'obligation de manger les animaux domestiques, chats et chiens mais aussi des rongeurs, rats, souris, taupes. Une fois ces ressources épuisées certains Sancerrois se virent contraints à manger des ordures. On raconte même que certains cas de cannibalisme furent recensés. Dans son récit du siège de Sancerre La Thaumassière relate le cas d'une famille dont les membres ont été condamnés à mort après qu'on eut retrouvé chez eux les restes de leur fille de trois ans. Le père a été brûlé vif, la mère a été pendue, la grand-mère est morte en prison. Reste que toute la population commence à crier famine. Les Sancerrois se voient donc dans l'obligation de se rendre le 25 août 1573.
L'exil des protestants berrichons au XVIIe siècle
Il faudra attendre la fin du XVIe siècle pour que catholiques et protestants puissent coexister pacifiquement au sein du royaume de France. En avril 1598 le roi Henri IV promulgue à Nantes un édit qui se veut de pacification et de tolérance. Les protestants obtiennent la liberté de culte, l'accès à toutes les charges et professions, le droit de tenir des assemblées politiques et celui de garder des places fortes au nom du roi pour assurer leur sécurité. Ces droits leur seront retirés quelques années plus tard par le roi Louis XIII quand il signa l'édit de Grâce d'Alès en 1629 après une énième guerre de religion dirigée dans le Sud-Ouest par le duc de Rohan. A la fin du XVIIe siècle une partie des protestants qui vivaient dans le Berry ont quitté clandestinement la région pour un exil qui les a menés vers les îles britanniques ou les Pays-Bas.
Révocation de l'Edit de Nantes
Tout au long de la première moitié du XVIIe les deux religions coexistent pourtant de façon tout à fait apaisée. Mais, en 1661, la montée sur le trône du roi Louis XIV et sa volonté de faire appliquer de façon très rigoriste les termes de l'édit de Nantes froissent les protestants du royaume. Des commissaires vérifient si l'édification des temples protestants respecte bien les termes de l'édit. Dans le cas contraire l'édifice devait être détruit. Ces nouvelles dispositions ont été à l'origine de procès très longs, certains ont pu durer plus de vingt ans. Après ces premières mesures Louis XIV a fait interdire l'accès à certaines professions aux protestants, notamment celles de sage-femme et de médecin. Puis il leur interdit aussi la possibilité de posséder des d'offices ou de vendre leur bien. Souhaitant contrôler les flux des populations protestantes il leur interdit également de quitter le royaume sans justification. Ne pas se soumettre à ces nouvelles dispositions était passible de la peine de mort. Le roi se mit également à encourager les conversions à la religion catholique. Ce fut alors le temps des convertisseurs bottés, des dragons qui logeaient chez les protestants et y semaient la terreur. En octobre 1685 Louis XIV publie l'édit de Fontainebleau qui révoque l'édit de Nantes.
Les protestants furent alors nombreux à prendre le chemin de l'exil, de façon tout à fait clandestine puisqu'il leur était absolument interdit de quitter le royaume. Sur une population protestante d'environ 800 000 personnes, alors que la population du royaume s'élevait alors à environ 20 millions d'habitants, un peu moins de 200 000, c'est-à-dire près d'un quart, quittèrent le royaume.
Les protestants du Berry se sont dirigés en grande partie vers les îles britanniques ou les Provinces-Unies des Pays-Bas.
Après des débuts assez confidentiels, l'université de Bourges, fondée en 1463, prend de l'essor au XVIe siècle. Le département des arts (lettres et sciences) voit l'arrivée de professeurs réputés, comme l'Allemand Melchior Wolmar, admirateur de Luther. Calvin et Théodore de Bèze assistèrent à ses cours. L'écrivain français Jacques Amyot, qui fut son élève, lui succéda à la chaire de langue grecque.
Mais même si le département des arts rayonne grâce à de tels enseignements, c'est surtout le département du droit qui contribue à la renommée de l'université berruyère. Alciat et Cujas, noms illustres chez les juristes, y ont enseigné. Leurs leçons ont attiré de nombreux étudiants, la renommée des deux enseignants étant déjà illustre. On venait à Bourges de la France entière mais aussi de l'étranger (notamment d'Allemagne) se nourrir des cours de ces deux maîtres d'exception. Un de leurs élèves connut une triste fin. Le fils de l'électeur de Bavière, venu à Bourges pour se former à la faculté de droit, se noya en effet dans l'Auron avec deux de ses serviteurs. Le lieu du drame porte encore aujourd'hui le nom de " fosse des trois Allemands ".
Des rivalités étudiantes
Réunis en corporation influente, les étudiants de Bourges jouissaient de nombreux privilèges. Entre autres, ce sont eux qui élisaient le recteur de l'Université. Ceci explique sans doute le fait que ce dernier a rarement été un professeur. Les étudiants étaient divisés en cinq " maisons ", selon leur origine géographique. Cohabitaient ainsi les nations France, Berry, Aquitaine, Touraine et Allemagne. Chaque nation avait ses armoiries. Bien sûr, des rivalités éclataient parfois entre membres de nations différentes, surtout le soir, à l'occasion de soirées, quand l'alcool faisait perdre la mesure qu'on pouvait trouver dans les salles de classe. Aussi, si Bourges se réjouissait de la présence de cette jeunesse en son sein, qui égayait la ville, elle déplorait aussi parfois les rixes qui opposaient les étudiants de nations différentes.
L'éminent Cujas à Bourges
En 1529 François Ier et Marguerite de Navarre demandèrent au Milanais Alciat de venir enseigner à l'Université de Bourges. Il accepta. Sur les bancs de la faculté de prestigieux étudiants assistèrent à ses leçons, parmi eux Calvin, Wolmar, Amyot ou encore Théodore de Bèze. Alciat ne resta pas longtemps à Bourges. En effet, aimant l'argent peut-être plus encore que le verbe, il retourna en Italie ou le duc de Savoie, souhaitant le voir revenir, lui offrait un traitement bien supérieur à celui qu'il percevait dans le Berry.
L'éminent Cujas n'eut pas la vie facile à Bourges. Des collègues jaloux de ses succès commencèrent à fomenter des intrigues contre lui. Il dut ainsi quitter plusieurs fois la cité berruyère. Marguerite de Savoie, l'une de ses bienfaitrices, lui demanda de quitter Bourges pour venir dispenser son enseignement à Turin. Ce n'est qu'en 1576 qu'il revient à Bourges pour s'y établir définitivement, dans un hôtel de la rue des Arènes construit par Guillaume Pellevoysin (qui porte encore son nom).
Les dernières années de la vie de l'illustre professeur furent très agitées. On l'inquiéta pour sa bienveillance supposée à l'égard du protestantisme. La Ligue catholique le menace. A la mort d'Henri III les Ligueurs veulent l'obliger à se déclarer en faveur du cardinal de Bourbon, qui souhaite prendre la couronne de France. Il mourut en 1590.
Au milieu du XVIIIe siècle le contrôle du trafic de sel fit l'objet d'une véritable guerre du sel entre les contrebandiers et les brigades de la Ferme générale. Ce conflit se déroula en grande partie dans le Berry, dont la géographie fournissait un terrain de choix pour se cacher.
Si aujourd'hui le sel ne représente sans doute pas grand-chose dans l'imaginaire collectif il n'en n'était pas de même sous Louis XIV. Monopole royal depuis plusieurs années, le commerce du sel est très réglementé. En 1680 une Grande ordonnance vient codifier de façon précise tout ce qui concerne le sel, de son commerce à la gabelle, une taxe à payer dans les régions en fonction de leur lien avec ce commerce. Il y a six " pays de gabelle " dans le royaume, c'est-à-dire six régions où le montant à payer est différent. On trouve ainsi les pays de grande gabelle, où le montant de la gabelle est le plus élevé, les pays de petite gabelle et les pays de salines (ces derniers, qui produisent le sel sont très peu taxés dessus). Le Berry est un pays de grande gabelle, dans lequel le sel est très fortement taxé mais où en plus il est obligatoire d'en consommer au moins une certaine quantité.
Mandrin, Chouan, et les faux-sauniers du Berry
Les contrebandiers de l'époque se sont engouffrés dans le secteur du sel. En effet, les très fortes différences de prix entre les régions leur promettaient un commerce juteux ! Ce fut alors l'heure des faux-sauniers (c'est-à-dire trafiquants de faux sel) qui se développèrent, pour certains en véritables bandes organisées. Les faux-sauniers n'étaient pas uniquement de pauvres hères soucieux de gagner un sou ou deux pour améliorer l'ordinaire. On trouvait parmi eux des bourgeois, des soldats, des ouvriers, bûcherons, métayers, bateliers et même des nobles et des membres du clergé.
Les deux plus connus sont Louis Mandrin et Jean Chouan, dont la vie parsemée d'aventures est entrée dans la légende.
Les faux-sauniers devaient se garder des gabelous, gardes de la gabelle, qui tentaient de les arrêter. La contrebande de sel prend une telle ampleur que les contrôles s'accroissent, et que les méthodes des gabelous deviennent de plus en plus dure.
Des cachettes dans le Berry
Aujourd'hui, une guerre autour du sel peut sembler dérisoire mais à l'époque la contrebande de sel était passible au pire de la peine de mort, au mieux d'années de galère, d'une très forte amende, de coups de fouet ou d'un marquage au fer rouge (ces deux derniers châtiments étant réservés aux femmes).
La gabelle était véritablement un impôt qui pesait très lourd sur le peuple, et d'ailleurs les cahiers de doléances de 1789 regorgent de passages qui en demandent la suppression.
En Berry les contrebandiers ont trouvé de nombreuses cachettes. La Borne était sans doute l'un des repaires des faux-sauniers.
Roué en place publique
Quant aux deux contrebandiers de légende, Mandrin et Chouan ils eurent des destins différents. Jean Chouan tua avec un camarade un agent de la gabelle. Condamné à mort par contumace, il échappera à la peine capitale et mènera des troupes anti républicaine pendant la révolution française. Louis Mandrin, fait prisonnier, a eu moins de chance. Il a été roué vif en 1775 sur la place des Clercs à Valence. Aujourd'hui reste sa légende et sa complainte (voir encadré). Après sa mort (à laquelle 6 000 personnes ont assisté) le peuple chantait son épitaphe sous forme d'une mandrinade : " Le Mandrin dont tu vois le déplorable reste, qui termina ses jours par une mort funeste, Des gardes redoutés, des villes la terreur, Par des faits inouïs signala sa valeur, Déguisant ses desseins sous le nom de vengeance. Deux ans en plaine paix il ravagea la France, Dans ses incursions, ami des habitants, Taxa d'autorité les caisses de traitants. Lui seul à la justice arrachant ses victimes Il ouvrit les prisons et décida des crimes. Quoiqu'en nombre inégal, sans se déconcerter, Aux troupes de son prince il osa résister (...) Il fut pris sans pouvoir signaler son courage. D'un oeil sec et tranquille il vit son triste sort. Fameux par ses forfaits, il fut grand par sa mort. "
" Nous étions vingt ou trente,
Brigands dans une bande,
Tous habillés de blanc,
À la mode des...
Vous m'entendez ?
Tous habillés de blanc
À la mode des marchands.
La première volerie
Que je fis dans ma vie
C'est d'avoir goupillé,
La bourse d'un...
Vous m'entendez ?
C'est d'avoir goupillé
La bourse d'un curé.
J'entrai dedans sa chambre
Mon Dieu, qu'elle était grande !
J'y trouvai mille écus,
Je mis la main...
Vous m'entendez ?
J'y trouvai mille écus,
Je mis la main dessus.
J'entrai dedans une autre,
Mon Dieu, qu'elle était haute !
De robes et de manteaux
J'en chargeai trois...
Vous m'entendez ?
De robes et de manteaux,
J'en chargeai trois chariots.
Je les portai pour vendre
À la foire en Hollande.
J' les vendis bon marché,
Ils n' m'avaient rien...
Vous m'entendez ?
J' les vendis bon marché,
Ils n' m'avaient rien coûté.
Ces Messieurs de Grenoble
Avec leurs longues robes,
Et leurs bonnets carrés,
M'eurent bientôt...
Vous m'entendez ?
Et leurs bonnets carrés
M'eurent bientôt jugé.
Ils m'ont jugé à pendre,
Ah ! c'est dur à entendre !
À pendre et étrangler,
Sur la place du...
Vous m'entendez ?
À pendre et étrangler,
Sur la place du Marché.
Monté sur la potence
Je regardai la France,
J'y vis mes compagnons,
À l'ombre d'un...
Vous m'entendez ?
J'y vis mes compagnons,
À l'ombre d'un buisson.
Compagnons de misère,
Allez dire à ma mère,
Qu'elle ne me reverra plus,
Je suis un enfant...
Vous m'entendez ?
Qu'elle ne me reverra plus,
Je suis un enfant perdu ! "
A la veille de la Révolution cinq cents paroisses constituaient le bailliage du Berry. Ces paroisses étaient réparties entre huit sièges dont les chefs-lieux étaient alors Bourges, Issoudun, Châteauroux, Dun-le-Roi, Concressault, Henrichemont, Mehun et Vierzon. Le comte de la Châtre est nommé grand bailli d'épée du Haut et du Bas Berry par Louis XVI. Il était descendant de l'ancien gouverneur du Berry. Un intendant du roi détenait le pouvoir, " décentralisé " à l'époque entre deux subdélégués basés à Bourges et Châteauroux. L'administration économique, religieuse, militaire et judiciaire était à l'époque extrêmement complexe dans la France entière. Le Berry n'échappait pas à cette complexité, avec des frontières qui différaient selon les différentes administrations. Duché, bailliage, diocèse, à chacun son territoire et ses frontières.
La région écrasée d'impôts. A cette extrême complexité s'ajoutait le montant des impôts, très lourd dans la région berrichonne. La gabelle, impôt sur le sel, occasionna de vastes trafics et une véritable guerre du sel a opposé les contrebandiers et les policiers royaux. En plus de la gabelle s'ajoutaient des taxes, des droits de douanes...autant de prélèvements qui faisaient que, selon Taine, sur 100 francs de revenu le travailleur des campagnes et des villes devait reverser 53 francs. Les seigneurs et le clergé réclamaient aussi régulièrement des redevances. Les paysans berrichons vivotent, ayant de plus en plus de mal à joindre les deux bouts. Ils ne peuvent compter sur le soutien des grands propriétaires terriens. Partis vivre à la cour ces derniers se préoccupent plus de s'y faire bien voir que de gérer leurs biens berrichons. La terre du Berry continue d'être cultivée selon des procédés qui deviennent obsolètes. En conséquence, les récoltes, très maigres, ne sont pas suffisantes. Les hivers sont rudes, marqués par des famines qui prennent de plus en plus d'ampleur. En 1789, à l'occasion de l'assemblée des trois états (noblesse, clergé, tiers-état) qui se tient à Châteauroux l'abbé Legrand évoque le " malheureux paysan berruyer " en ces termes : " Sans biens, sans ressources, sans espérances, succombant sous le poids des impôts et sous la rigueur de la perception, traîné en prison pour des contraventions à des ordonnances bursales, n'ayant que son travail et ses larmes, abruti par la misère, il ne voit d'autre fin à ses maux que de retourner dans la poussière dont il est sorti. "
Les bois deviennent des coupe-gorges. On le voit, la situation n'est guère brillante. Les routes du Berry se peuplent de bandes de vagabonds et de bandits de grand chemin, prêts à tout pour assurer leur subsistance. Les villageois abandonnent leurs logements, qui pour aller vers des régions plus fertiles, qui pour rejoindre les voleurs de grands chemins. Les villages se dépeuplent, les champs sont en friche, une attaque guette à chaque coin de bois. Les paysans ne sont pas seuls à souffrir : en ville les artisans ont eux aussi la vie dure, écrasés qu'ils sont par le poids des impôts et des taxes diverses. L'écart est grand entre ces pauvres berrichons et les bourgeois locaux. Les notables éclairés décident de s'investir dans la défense de l'intérêt général. Les députés du tiers-état du Berry seront issus de leurs rangs. Dans le clergé les disparités règnent entre le haut clergé, composé de prélats qui vivent très bien et le bas clergé, curés de campagne sans le sou.
C'est dans ce contexte que le Berry apprend, en 1789, la réunion des Etats-généraux dans les provinces et la rédaction des cahiers de doléances. Le 16 mars 1789 les trois ordres se réunissent à Bourges, dans l'église de Carmes (aujourd'hui l'école des Beaux-Arts). Dans un premier temps les relations entre les trois ordres se passèrent convenablement. Mais des dissensions ne tardèrent pas à apparaître. Les rivalités émergèrent. Les cahiers de doléance se remplirent des demandes des représentants des trois ordres.
Les répercussions de la prise de la Bastille en Berry. A Paris, la révolte grondait sourdement. Exaspéré, le peuple parisien se souleva et pris la Bastille le 14 juillet 1789. Cette prise d'un symbole souleva dans le Berry un grand enthousiasme. Des manifestations éclatèrent dans les villes de la région berrichonne. Châteauroux salua " l'héroïque fermeté des Parisiens ", au Blanc on chantait un Te Deum, à Sancoins on rendit hommage aux Parisiens, à Bourges des feux de joie furent allumés. Ces manifestations de joie restèrent pacifiques. On ne vit pas dans le Berry, comme ce fut le cas dans d'autres provinces du royaume de France, de château mis à sac ni de murailles assiégées. En revanche, les demeures de certains négociants, accusés par le peuple de s'être accaparé du blé alors que la disette régnait, furent envahies. A Bourges, place Gordaine, le peuple entra ainsi chez un marchand de soieries et se livra au pillage. Le notable aurait sans doute été fortement mis à mal s'il ne s'était enfui.
Les départements du Cher et de l'Indre, aux frontières redessinées après la Révolution, ne firent pas de difficulté pour accepter l'autorité des gouvernements qui suivirent 1789. Sous l'Empire, le château de Valencay, propriété de Talleyrand, devint en 1808 la résidence du fils du roi d'Espagne, le prince des Asturies Ferdinand et de son frère, Don Carlos.
Le Berry avait accepté le gouvernement Napoléonien mais, les lourdes charges imposées par l'Empereur firent rapidement grogner un peu partout dans la région. Louis XVIII, qui prit la tête de la France pendant l'exil de Bonaparte à l'île d'Elbe, aurait pu profiter de la situation et adoucir le quotidien des Berrichons. Il n'en fit rien, ce qui explique pourquoi le Berry accueillit avec enthousiasme le retour de l'Empereur. Sa défaite à Waterloo (1815) se traduisit dans le Berry par une manifestation contre les prêtres et les royalistes, rendus responsable de l'échec napoléonien. A Bourges, plus de huit cent personnes se rassemblèrent devant la mairie, menaçant la tranquillité publique. Le 25 juin 1815 Napoléon abdiqua en faveur de son fils.
Les jacqueries de 1847. Le début de l'année 1847 est marqué par les jacqueries qui agitent une trentaine de communes dans le département de l'Indre. A cette époque l'hiver 1846-1847 est terrible. La famine qui touche le monde rural va dégénérer en révoltes, notamment dans l'Indre. Trente-cinq communes du département se soulèvent du 13 au 20 janvier 1847. La jacquerie de Buzançais est la plus connue. Elle se termine dans le sang et trois hommes seront condamnés à mort à son issue.
" La cherté excessive des grains est une cause d'agitation et d'inquiétude, surtout au commencement d'une saison pendant laquelle les travaux vont être très rares et le salaire des ouvriers insuffisant pour nourrir leur famille. " Cette délibération du 10 novembre 1846 du conseil municipal de Châtillon-sur-Indre fait état d'une situation catastrophique pour les plus pauvres. Déjà l'hiver précédant, en 1845, avait été très rude. Des pluies importantes et des inondations ont fortement endommagé les récoltes. L'augmentation des prix des denrées de première nécessité et la montée du chômage plonge les paysans, ouvriers agricoles, dans une grande misère en 1846. Leur situation était déjà de base précaire. Dans le canton de Mézières-en-Brenne, par exemple, un homme seul qui travaille peut subvenir à ses besoins. Mais celui qui a une femme et des enfants qui ne contribuent pas à la vie du foyer en ramenant un peu d'argent subsiste dans la misère. La situation des ouvriers de la terre n'est pas plus enviable dans les autres cantons. Et si une catastrophe climatique vient à priver ces familles du produit de leur subsistance ou si les prix des denrées augmentent trop, la famine guette. En 1846 les conseils municipaux du département de l'Indre soulignent régulièrement l'augmentation du nombre de chômeurs. A Issoudun 527 travailleurs demandent à être admis à des ateliers de charité. Le maire ne peut en embaucher qu'une centaine. Les communes s'endettent pour soulager la misère des plus démunis, devenus indigents. Mais le dénuement est tel que ces deniers ne suffisent pas.
Au son du tocsin. Très vite, la révolte prend forme. Le tocsin, moyen de rassemblement des populations, est sonné à Buzançais, à Saint-Lactencin, à Villedieu. Les pauvres des campagnes prennent ensemble la route pour se rendre au bourg, le cortège prenant plus d'ampleur à chaque embranchement de chemin, avançant au rythme du tambour. Les émeutiers pénètrent dans les fermes, montent dans les greniers à grains. L'idée est de recenser les ressources disponibles et d'en organiser la vente à prix très réduits pour la population. A Buzançais les émeutiers ont bloqué des convois de blé et de farine, ne souhaitant pas que ces denrées soient exportées alors que la population mourrait de faim. Dans l'Indre des moulins, symbole de l'exploitation des plus démunis, sont saccagés. Les portes et les fenêtres sont brisées par la foule, les meubles sont détruits, tout est cassé. S'il y a de l'argent il est dérobé. Tour à tour les moulins de Buzançais, Villedieu, Malaise, Parçay et Girolles sont détruits. Les machines à battre le blé sont également cassées. Pour les émeutiers le modernisme agricole est synonyme de chômage.
Le sang coule à Buzançais. Les communes voisines de celles dans lesquelles les émeutes font rage redoutent de les voir arriver à leurs portes. A Buzançais le sang coule : les émeutiers, lors du pillage de plusieurs maisons, massacrent un bourgeois. Victor Hugo évoque cet épisode dans Choses vues le 7 mars 1847 : " On vient de juger et de considérer à Châteauroux les gens de Buzançais qui, à l'occasion de trois charrettes de blé, lesquelles ont traversé leur ville, ont pillé plusieurs maisons le 13 janvier dernier et affreusement tué un bourgeois appelé Monsieur Chambert, à coups de hache, de fourches, de marteaux, de talons de souliers. Un des témoins a dit : " J'ai vu Monsieur Chambert déjà blessé à la tête qui s'enfuyait. Son visage était si inondé de sang que j'ai cru qu'il avait la face couverte d'un foulard rouge. " "
La Cour royale de Bourges évoque ces faits le 16 janvier. Le 4 mars elle rend son verdict. Le gouvernement compte sur la rapidité de cette décision pour marquer les esprits et servir d'exemple. Sur les treize accusés trois sont condamnés à mort, neuf aux travaux forcés dont quatre à perpétuité et un à cinq ans de prison, par un jury composé de propriétaires fonciers. Quatorze des condamnés ont voulu effectuer un recours : il leur a été refusé. Ce verdict a été contesté à l'époque, une partie de la presse évoquant " la rigueur de la répression " plutôt que " le désir de justice ". L'affaire de Buzançais fait partie des nombreux événements survenus en 1847 et qui achevèrent de jeter le discrédit que le régime de Louis-Philippe.
Cet ancien officier de liaison de Winston Churchill, éminent spécialiste des sous-marins et des porte-avions est né au Blanc, dans l'Indre, le 13 octobre 1899. Son entrée à l'Ecole navale de Brest succède à une scolarité au Blanc, pour le collège, et à Angers, pour le lycée. Il devient lieutenant de vaisseau en 1930. Après avoir occupé des postes opérationnels il est affecté à l'Etat-Major général de Paris. Il participe en tant qu'expert à la conférence navale de Londres en 1935. Quatre ans plus tard il rejoint l'Amirauté française. Elément important du lien avec l'Etat-Major britannique il sera par la suite officier de liaison de Winston Churchill. Ses activités de résistants dans les années 1940 l'amènent dans les cachots du gouvernement de Vichy. Réformé c'est à Alger qu'il prendra un nouveau départ en participant au réarmement des forces françaises. Chargé des opérations de débarquement en Provence en 1944, sous les ordres du Maréchal Juin, il ira ensuite commander au Maroc, en Indochine, en Tunisie et dans l'Océan Indien. Pour son retour en France en 1954, à Toulon, il participe à la campagne de Suez. En 1956 il devient amiral. Il est inhumé au Blanc.
En juillet 1789 le peuple berrichon s'affola d'une rumeur selon laquelle pas moins de 4000 brigands marchaient sur la région, pillant et semant la terreur sur leur passage. Le 29 juillet la ville de Sancerre bruissait de rumeurs : des brigands, venus de la Loire après avoir ravagé la Bourgogne, étaient en passe d'arriver sur la ville. Le tocsin fut sonné, les Sancerrois prirent les armes. Ils attendaient les brigands de pied ferme. Au Blanc, à Argenton, de Saint-Gaultier à La Châtre des courriers annonçaient l'arrivée imminente de ces bandes agressives, armées jusqu'aux dents. Le peuple du Berry organisa sa défense. Bourges fut sollicité pour l'envoi de secours. Lignières, Saint-Hilaire-en-Lignières et Châteaumeillant rassemblèrent des hommes valides prêts à se battre. Le 31 juillet sonna la fin de la rumeur dans le Sancerrois : les brigands n'étaient qu'une fausse alerte. Pour autant la peur des brigands avaient amené les communes à gérer elles-mêmes une forme d'administration et à disposer de troupes hors du contrôle du pouvoir royal.
Né à Châteauroux en 1773 Henri-Gatien Bertrand reçut de l'Empereur la mission de fortifier Alexandrie. Le Berrichon s'était déjà illustré pendant la campagne d'Egypte. Il reçut les insignes de général à l'âge de 28 ans. Né à Sancerre en 1765, MacDonald reçut les galons de colonel en 1792, à la suite de sa brillante conduite à Jemmapes. Devenu général, il oeuvra pendant la campagne de Belgique sous le Directoire. Après avoir occupé pendant un temps le poste de Gouverneur de Rome il s'illustre à Wagram. Il participera aussi à la désastreuse campagne de Russie de l'Empereur. Il reviendra en terre berrichonne en 1815, année pendant laquelle il commandera à Bourges la 21e division militaire. " MacDonald avait une grande loyauté ", disait de lui Napoléon. Il mourut en 1840.
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